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Par Kaylie Tiessen
Le débat sur l'inflation continue d'être un sujet très brûlant, tant dans les conversations sur les politiques publiques qu'autour de la table de négociation. Ce troisième blogue de la série "Focus sur l'inflation" du département de recherche examine de plus près les salaires des travailleuses et travailleurs et l'effet de l'inflation sur leur pouvoir d'achat.
Le premier blogue répondait à des questions sur la façon dont la Banque du Canada mesure et cible l'inflation. Le second portait sur ce que nous disent les données sur l'inflation à propos des prix au Canada.
Il n'y a pas de réponse simple à cette question : comment les salaires des travailleurs se maintiennent-ils en cette période d'inflation accrue ? L'examen des salaires moyens à l'heure ou par secteur d'activité donne des réponses légèrement différentes. Chaque classification d’emploi dans chaque lieu de travail aura une histoire légèrement distincte à raconter, car les travailleurs individuels, les comités de négociation et les employeurs prennent tous des décisions sur les salaires en temps réel ou en fonction des augmentations négociées précédemment.
Si vous appartenez à une unité de négociation qui ne négocie pas cette année, vos salaires ont été prénégociés. À moins que votre convention collective ne contienne une clause d’indexation sur le coût de la vie (ICV), votre salaire sera augmenté du montant négocié précédemment et il sera probablement inférieur à l’inflation cette année.
Dans quelques cas isolés, les unités de négociation d’Unifor ont obtenu des augmentations de salaire plus tôt que prévu parce que les employeurs avaient du mal à attirer du personnel. Cela s’est traduit par des hausses salariales importantes chez Loblaws à Ajax et dans le corridor Sea-to-Sky en Colombie-Britannique. Parallèlement, certaines unités de négociation dans les secteurs les plus durement touchés par la pandémie doivent faire face aux demandes de concessions des employeurs.
Les travailleuses et travailleurs dont la convention collective contient une clause d’indexation sur le coût de la vie verront leur salaire augmenter selon la formule d’indexation convenue précédemment.
Abstraction faite des considérations ci-dessus, les données relatives aux salaires moyens comparées à l’inflation peuvent nous en apprendre beaucoup sur la manière dont l’inflation affecte le pouvoir d’achat des personnes qui travaillent.
Comme l’illustre le tableau ci-dessous, le salaire moyen a augmenté de 11 % depuis janvier 2019. Au cours de la même période, l’indice des prix à la consommation (ou inflation) a augmenté de 8 %. Si la croissance des salaires a certes pris du retard ces derniers mois, cela signifie en fin de compte que le salaire moyen a augmenté plus rapidement que l’inflation au cours de cette période, laissant les travailleuses et travailleurs, en moyenne, avec un plus grand pouvoir d’achat.
Toutefois, l’examen du salaire moyen par secteur d’activité montre que les travailleuses et travailleurs de certains secteurs s’en sortent beaucoup mieux que d’autres.
Par exemple, le salaire moyen dans les secteurs des soins de santé, de l’hôtellerie et de la fonction publique a augmenté à un rythme inférieur à celui de l’inflation, ce qui signifie que ces personnes ont, en moyenne, un pouvoir d’achat inférieur à celui d’avant la pandémie.
En Ontario, le projet de loi 124 a restreint les augmentations salariales dans les secteurs de la santé, de l’éducation et des services publics à seulement 1 % par an, laissant les travailleuses et travailleurs du secteur public de l’Ontario avec un pouvoir d’achat nettement inférieur à celui d’avant la pandémie.
Dans le même temps, les salaires dans l’industrie manufacturière et le commerce de gros et de détail ont augmenté légèrement plus vite que l’inflation, laissant cette main-d’œuvre avec un pouvoir d’achat relativement similaire.
La Banque du Canada continue de s’attendre à ce que le niveau élevé d’inflation se dissipe entre le milieu et la fin de 2022. Pour lutter contre cette inflation passagère, les travailleuses et travailleurs doivent négocier en conséquence, notamment en réexaminant l’importance des clauses relatives à l’indexation sur le coût de la vie dans les conventions collectives et en demandant le retrait des lois régressives de suppression des salaires, comme le projet de loi 124 de l’Ontario.