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Lana Payne, présidente nationale d’Unifor
Publié à l'origine dans le Toronto Star (En anglais seulement)
En fin de semaine, le gouvernement fédéral est prêt à rester les bras croisés et à regarder une porte se fermer sur des milliers de travailleuses et travailleurs canadiens, en mettant fin aux mesures temporaires de l’assurance-emploi avant la mise en place d’une solution à long terme. Les travailleuses et travailleurs se retrouveront avec un régime d’assurance-emploi qui les pénalisera comme avant pour avoir perdu leur emploi.
Le samedi 24 septembre 2022, une série de mesures temporaires de l’assurance-emploi prendra fin en pleine crise de l’abordabilité. Le prolongement de ces mesures temporaires de l’assurance-emploi est pourtant l’une des mesures les plus efficaces que le gouvernement fédéral peut prendre à court terme. Cette décision montrerait clairement que le Canada prend un virage et qu’il est prêt à adopter une politique du marché du travail donnant plus de moyens d’action aux travailleuses et travailleurs au lieu de les punir.
Avant la pandémie, seulement 40 % des travailleuses et travailleurs sans emploi réunissaient les conditions requises pour recevoir des prestations de l’assurance-emploi. C’est un échec politique lamentable.
En clair, il ne s’agit pas d’une question budgétaire. C’est une question politique. Après tout, le gouvernement fédéral s’est dispensé en 1990 de verser des cotisations à l’assurance-emploi, puis il a passé des années à piller les surplus de l’assurance-emploi, à réduire les prestations et à rendre la protection moins universelle.
Pendant la pandémie, les travailleuses et travailleurs canadiens ont bénéficié d’un programme d’assurance-emploi qui a commencé à régler des problèmes de longue date. Nous ne pouvons pas maintenant laisser le gouvernement fédéral abandonner tranquillement les travailleuses et travailleurs pendant que beaucoup regardent de l’autre côté.
Pas quand Pierre Poilievre vient d’être élu chef des conservateurs fédéraux. Nous connaissons sa position sur le soutien du revenu, lui qui a mené comme député une célèbre campagne contre l’élargissement des mesures de soutien du revenu et contre la prestation canadienne d’urgence (PCU), même dans les pires moments de la pandémie.
M. Poilievre pose encore une fois un mauvais diagnostic sur la cause de l’inflation au Canada. Il pointe du doigt de bons programmes comme la PCU au lieu du fléau des prix abusifs et des profits excessifs des sociétés qui continuent de faire grimper le coût de la vie.
Les libéraux et les néo-démocrates fédéraux doivent s’unir pour défendre les travailleuses et travailleurs et montrer qu’un programme d’assurance-emploi accessible et élargi est tout aussi nécessaire maintenant qu’il l’était en 2020.
Il n’y a peut-être plus autant de fermetures dues à la COVID, mais l’assurance-emploi demeure une bouée de sauvetage pour des milliers de personnes. Et il faut admettre que nous avons toujours besoin d’une politique intelligente pour le marché du travail.
Des industries et des régions du pays comptent sur l’assurance-emploi pour soutenir les hauts et les bas de leurs années d’exploitation, notamment des dizaines d’industries et d’entreprises saisonnières. Dans le secteur de l’automobile et des pièces d’automobile, les travailleuses et travailleurs ont dû faire face à des fermetures causées par la COVID, aggravées par des problèmes liés à la chaîne d’approvisionnement et à des pénuries de pièces tout en luttant pour avoir le droit de toucher des prestations de l’assurance-emploi.
Par exemple, Syncreon fournit des services de jalonnement, de dosage et d’entreposage pour l’usine de montage Stellantis de Windsor. Des membres d’Unifor ont été mis à pied pendant 68 semaines au cours des deux dernières années en raison de la pénurie de puces électroniques et de la réduction des quarts de travail. Le dernier clou au cercueil est venu avec une annonce cet été. Le 31 octobre 2022, Syncreon cessera ses activités au moment où Stellantis internalisera tout ce travail, mettant alors 298 travailleuses et travailleurs au chômage.
Que feront-ils, à part se battre comme des diables?
Si les mesures temporaires de l’assurance-emploi ne sont pas prolongées, ces travailleuses et travailleurs sans emploi se verront refuser l’accès à l’assurance-emploi, comme des milliers d’autres.
Lorsque les travailleuses et travailleurs canadiens cesseront de toucher ces prestations à compter du 25 septembre, le nombre d’heures exigé pour avoir droit aux prestations, de même qu’aux prestations parentales et aux prestations de maladie, augmentera du jour au lendemain. Les travailleuses et travailleurs verront leurs indemnités de départ récupérées par le gouvernement.
Unifor déploie des efforts soutenus depuis quelques années dans la lutte pour améliorer l’assurance-emploi.
Nous avons rencontré un nombre incalculable de députés. Nous avons participé aux consultations fédérales pendant lesquelles l’assurance-emploi était scrutée à la loupe. Nous avons parlé du nombre incroyable de travailleuses et travailleurs qui se sont vu refuser de l’aide même s’ils avaient cotisé au régime.
Plus important encore, nous avons proposé des solutions.
Mais nous attendons encore aujourd’hui que le gouvernement mette en oeuvre ces solutions. Mesdames les ministres Chrystia Freeland et Carla Qualtrough, ne tirez pas le tapis de sous les pieds des travailleuses et travailleurs avant l’adoption de ces nouvelles améliorations.
Prolongez les mesures temporaires de l’assurance-emploi dès votre retour à la Chambre des communes.