Les difficultés dans les aéroports du Canada exigent des solutions et non la recherche de coupables.

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People standing in line with luggage at the airport check in.
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Par Kaylie Tiessen

Les voyageurs aériens sont frustrés, et pour cause.  La pénurie de main-d’œuvre dans ce secteur s’est heurtée à la fulgurante recrudescence de la demande de déplacements aériens et a entraîné des délais de vol à répétition, des pertes de bagages, des annulations et d’autres perturbations dans les aéroports du monde entier.

Ces problèmes surviennent dans les aéroports partout dans le monde, mais ce sont dans ceux du Canada que ces problèmes sont les pires.

De manière générale, les sociétés ont réagi de deux manières : d’abord en mettant en cause les pénuries de main-d’œuvre et, ensuite, en réduisant la capacité sur certains itinéraires afin de redistribuer ses effectifs pour desservir les marchés à forte demande.

De leur côté, les gouvernements persistent à blâmer la COVID et laissent entendre que les parties prenantes doivent tout simplement se montrer patientes.

Face à ces pertes, les gouvernements du monde entier ont fourni un soutien considérable à l’industrie. Seuls deux gouvernements - les États-Unis et les Pays-Bas - ont imposé de strictes conditions à ce financement, notamment en obligeant les employeurs à maintenir les travailleuses et travailleurs sur leurs registres de paie.

Une tentative a été faite au Canada par le biais de son Crédit d'urgence pour les grands employeurs (CUGE), mais les conditions étaient minimales et aucune information n’a été fournie quant à leur mise en œuvre concrète.

Globalement, le secteur compte 20 % d’employés en moins, déplaçant 12 % moins de vols qu’avant la pandémie. En bref, les compagnies aériennes et les aéroports doivent trouver des moyens d’embaucher davantage de personnel.

Hélas, les employeurs ne déploient pas suffisamment d’efforts pour relever ce défi.

D’après l’enquête sur les postes vacants et les salaires, le salaire initial moyen offert pour un travailleur de l’industrie n’a augmenté que de 6 % (1,30 $) depuis 2019. Cela représente une moyenne de moins de 2 % par an et seulement 2,5 % de plus que ce qui était offert au premier trimestre de 2020. De nouvelles recherches indiquent que le salaire horaire moyen offert dans le secteur du transport est inférieur au salaire d’acceptation de l’industrie (le salaire auquel les travailleuses et travailleurs sont prêts à travailler) - démontrant clairement une pénurie de salaires et non une pénurie de main-d’œuvre.

Faire miroiter des salaires de départ inférieurs à la moyenne à des employés potentiels ne témoigne pas d’une industrie qui tente désespérément d’attirer des employés. Au contraire, cela révèle l’apathie et même le dédain des dirigeants à l’égard des autres parties prenantes qui, à la fois, font fonctionner le système et fournissent les revenus nécessaires à la génération d’un quelconque profit.

Parallèlement, le gouvernement continue d’appliquer des solutions de fortune pour résoudre le problème. Le budget 2022 a alloué 11 millions de dollars pour embaucher plus d’agents et d’agentes à l’ASFC. Tout dernièrement, une nouvelle technologie a été introduite par le biais de l’application ArriveCan pour accélérer les déclarations de douane à la frontière. Malheureusement, ces initiatives sont loin de suffire à lever les obstacles au bon fonctionnement de l’industrie. Or, les délais de traitement aux frontières ne sont qu’un des nombreux problèmes qu’il faut régler.

Tout comme dans de nombreux aspects de la vie sociale et économique, la pandémie n’a pas créé les problèmes que l’on connaît actuellement, elle n’a fait que les amplifier.

Les dizaines d’années passées à déréglementer l’industrie de l’aviation, y compris la privatisation, ont discrètement érodé la qualité du travail - pour les pilotes, les agents de bord, les représentants du service à la clientèle, les bagagistes, les contrôleurs aériens, les spécialistes de l’information de vol et autres. Cette déréglementation s’est traduite en une réduction de la qualité du service, une diminution de la formation en milieu de travail, une réduction des avantages sociaux pour les travailleuses et travailleurs de l’aviation et, au final, une dégradation de l’expérience du voyageur.

Le travail à bas salaire, les horaires imprévisibles et les transferts de contrat généralisés ne sont que trois tactiques utilisées par les employeurs du secteur pour réduire le coût de leur effectif. De toute évidence, ces tactiques font obstacle au recrutement et à la rétention de la main-d’œuvre, mais la plupart des employeurs refusent d’y remédier.

Sans action, les employés et les voyageurs demeureront confrontés à une industrie qui ne répond pas aux attentes.

En fait, la pandémie a révélé aux deux groupes qu’il existe d'autres options.

Les employeurs et les gouvernements doivent cesser de pointer du doigt et prendre des mesures pour améliorer les conditions de travail afin d’éliminer les arriérés et de relancer l’industrie.

Pour en savoir plus sur le lobbying d’Unifor à ce sujet, consultez  ici, ici et ici.

 

Researchers

Kaylie Tiessen

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Kaylie Tiessen, National Representative, Research Department
Représentante nationale, département de la recherche
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