Un intermède pour les victoires, mais le combat doit continuer : CONSEIL RÉGIONAL DE L’ONTARIO

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Shinade Allder introducing Lana Payne at council.
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Comme le chantait Joe Strummer des Clash, nous nous sommes « battus contre la loi ».

Sauf que cette fois, la loi n’a pas gagné.

Les déléguées et délégués se sont réunis les 2 et 3 décembre 2022 à l’hôtel Sheraton de Toronto pour le premier Conseil régional de l’Ontario d’Unifor en présentiel depuis le début de la pandémie.

Ce fut l’occasion de célébrer des victoires telles que la récente décision de la Cour supérieure, invalidant le projet de loi 124 du premier ministre Doug Ford pour cause d’inconstitutionnalité, et la mobilisation rapide et efficace d’Unifor avec d’autres syndicats pour soutenir les travailleuses et travailleurs du secteur de l’éducation du SCFP, y compris en planifiant une grève générale quand Doug Ford a utilisé la disposition de dérogation.

« [Le gouvernement] a sorti son plus gros marteau, un marteau-pilon - une loi spéciale qui imposait non seulement un contrat, mais recourait à la tristement célèbre disposition de dérogation pour abolir le droit de grève et de négociation collective, a déclaré la présidente nationale d’Unifor, Lana Payne, dans son discours lors de la première journée de la conférence.

La loi prévoyait également des amendes destinées à réprimer le syndicat. Une manœuvre qui selon nous, si elle avait été maintenue, aurait été utilisée encore et encore pour priver les travailleuses et travailleurs de leurs droits dans d’autres provinces et dans le secteur privé. Pour nous, il était évident que nous ne pouvions pas laisser faire. »

Si Mme Payne reconnaît avoir effectivement appelé et envoyé des messages aux ministres et au personnel de M. Ford pour lancer l’alerte, c’est grâce à la solidarité collective des dirigeantes et dirigeants et des membres d’Unifor que le vent a tourné.

Ainsi, c’est à l’unanimité que le Conseil exécutif national du syndicat a appuyé l’appel à la grève générale en Ontario, et que le Conseil élu de l’automobile et des fournisseurs de pièces indépendants d’Unifor - représentant 40 000 travailleuses et travailleurs de l’industrie manufacturière - a envoyé une lettre au premier ministre Ford pour l’informer qu’il était prêt à stopper la production, entraînant du même coup une crise économique considérable, alors que les travailleuses et travailleurs de toute la province protestaient d’une même voix.

« Le gouvernement de l’Ontario a cru qu’il pouvait s’en sortir, a déclaré Lana Payne. Et au bout de quelques jours, ils ont compris que sans notre cerveau et nos muscles, plus rien ne pouvait fonctionner. Mes amis, je tiens à vous rappeler que nous sommes solidaires, lorsque nous nous mobilisons, aucune puissance n’est plus grande que la nôtre ici bas. »

Dans son allocution, Mme Payne a expliqué qu’en raison notamment de l’inflation et d’une crise de l’accessibilité financière, les travailleuses et les travailleurs ont le vent en poupe pour se battre contre les entreprises mercantiles, citant des exemples de gains importants obtenus par les membres qui sont employés dans le nettoyage, les casinos, les entrepôts et qui travaillent dans d’autres secteurs. 

Elle a également évoqué les efforts déployés récemment par le syndicat à Ottawa au cours de la semaine nationale de lobbying, notamment pour demander au gouvernement de réformer l’assurance-emploi, pour faire pression en faveur d’une loi fédérale anti-briseurs de grève et, en direct à la télévision, pour reprocher à la Banque du Canada de mener une guerre des classes.

« La Banque du Canada doit comprendre qu’il est inacceptable de mettre les gens au chômage pour atteindre une quelconque cible inflationniste arbitraire, a affirmé Lana Payne. Et soyons clairs, notre syndicat ne restera pas les bras croisés pendant que les travailleuses et travailleurs sont jetés en pâture. »

La présidente intérimaire du Conseil régional de l’Ontario, Shinade Allder, a formulé les objectifs de la réunion du conseil : « Au cours des prochains jours, nous tracerons la voie à suivre pour la prochaine année, car les difficultés liées aux multiples hausses des taux d’intérêt et à l’inflation record se poursuivent. Nous y débattrons des résolutions et des recommandations destinées à trouver des solutions aux enjeux auxquels sont confrontés nos membres pour continuer à lutter au nom de tous les travailleurs et travailleuses. »

Plus tôt dans la journée, la directrice de la région de l’Ontario, Naureen Rizvi, a précisé dans son discours que même si la Cour supérieure de l’Ontario a déclaré inconstitutionnel le projet de loi 124 - la Loi sur le plafonnement des salaires pour les travailleuses et travailleurs des soins de santé à la fin novembre, le gouvernement Ford reste encore dangereux.

« Nous ne pouvons pas arrêter une seconde pour savourer et célébrer cette victoire. Nous le ferons en allant de l’avant, a-t-elle rappelé à la foule. En effet, nous savons très bien qu’ils ont l’intention de faire appel de la décision. Nous savons que notre tâche est loin d’être terminée. Comme pour toute décision rendue par écrit, la bataille est toujours ardue pour parvenir à l’étape où l’on répare l’erreur. »

Naureen Rizvi speaking at the podium.

Mme Rizvi, qui portait un chandail sur lequel était écrit en persan « femme, vie et mouvement », a également rappelé aux déléguées et délégués que le 6 décembre, Journée nationale de commémoration et d’action contre la violence envers les femmes, arrivait à grands pas.

Elle a livré un récit troublant d’une situation où elle a été témoin de la violence basée sur le genre. Son amie avait épousé son cousin, avait eu deux enfants, mais ils ont fini par divorcer et elle a commencé à sortir avec un autre homme. Comme son nouveau petit ami commençait à devenir violent, elle ne se sentait pas en sécurité. Après avoir appelé la police à maintes reprises, elle a réussi à s’enfuir avec ses filles, allant jusqu’à prendre une injonction restrictive (engagement de ne pas troubler l’ordre public). Il est allé en prison pour l’avoir enfreinte, a-t-elle ajouté.

« Le jour où il a été libéré, en quelques heures à peine, il a trouvé où était situé son appartement; les filles étaient à l'école et les deux petites filles de mon cousin ont grandi sans mère, a déclaré Naureen Rizvi, les larmes aux yeux.

Son sentiment d'impuissance pour sa propre sécurité me hante encore aujourd’hui. Notre système comporte tellement de lacunes qu’il ne parvient pas à protéger les femmes et qu’il permet aux délinquants de recommencer à les violenter. »

Plus tard dans la matinée, Shree Paradkar, éditorialiste au Toronto Star, a animé une discussion de groupe et a longuement parlé des abus dont sont victimes les journalistes au travail.

Tracey Ramsey, directrice du Service de la condition féminine d’Unifor, a fait une présentation sur la justice reproductive à la suite de l’annulation de l’arrêt Roe c. Wade aux États-Unis et des répercussions de cette décision sur les Canadiennes.

En guise d’appel à l’action, elle a encouragé les déléguées à se rendre dans leur pharmacie locale et à demander si celle-ci propose un médicament pour l’avortement, le mifegymiso, qui est accessible aux femmes et aux personnes transgenres. Et dans la négative, pourquoi?

« Les droits des femmes sur leur propre corps ne devraient jamais faire l’objet d’un débat, a-t-elle déclaré. Il ne s’agit pas uniquement de notre corps. C’est une question de contrôle sur les femmes et les personnes transgenres et pour faire en sorte que nous ne soyons pas libres de vivre nos vies. Nous ne pouvons pas rester sans rien faire. »

La directrice du Service des droits de la personne, Christine Maclin, a expliqué qu’il y a du racisme à plusieurs niveaux, mais que rares sont les personnes qui se sentent à l’aise d’en parler et d’aborder la justice raciale. Mais on peut commencer sur le lieu de travail en inscrivant les intervenantes et intervenants en justice raciale dans le libellé des conventions collectives. À ce jour, 198 intervenantes et intervenants d’Unifor sont répartis sur les lieux de travail à travers le Canada, dont dernièrement la section locale 2002 pour les travailleuses et travailleurs d’Air Canada Jazz.

« Nous devons faire tout ce que nous pouvons, quand nous le pouvons, a déclaré Mme Maclin. Qu’êtes-vous prêt à faire? Et vous devez faire tout ce que vous pouvez, quand vous le pouvez, pour la justice raciale. »

Le Conseil régional de l’Ontario et les sections locales ont recueilli 25 000 $ pour le fonds de grève afin d’aider la section locale 462 représentant environ 90 travailleuses et travailleurs des services alimentaires du Durham College à Oshawa qui sont sur les lignes de piquetage depuis le 28 novembre dans leur lutte contre leur employeur, le Groupe Compass Canada.

Naureen Rizvi, Tullio DiPonti and Shinade Allder at the podium addressing council.

CONSEIL RÉGIONAL DE L’ONTARIO - JOUR 2

Le deuxième jour du Conseil régional de l’Ontario, le Conseil régional a rendu hommage à Tullio DiPonti, secrétaire-trésorier qui part à la retraite, pour son travail au sein du syndicat au cours des neuf dernières années.

« Peu importe où j’irai, quand je prendrai ma retraite, je serai toujours parmi vous, a-t-il déclaré, sous un tonnerre d’applaudissements. Ne vous inquiétez pas. Je vais rester dans les parages. Je sais que, quoi qu’il arrive, nous travaillerons tous ensemble. Même si nous avons des disputes entre nous, au bout du compte, nous sommes une famille et nous nous serrons les coudes. »

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Tullio DiPonti retired ORC Secretary Treasurer

Dans son allocution, Len Poirier, secrétaire-trésorier national, a passé en revue certains des changements structurels du syndicat depuis le Congrès de l’été, soulignant à nouveau que la transparence et la redevabilité restent au premier plan et que l’accent est mis sur un meilleur service aux sections locales.

« Cela signifie que nous devons faire en sorte que les membres disposent d’information sur la situation actuelle de notre syndicat, tout en veillant à ce que ce dernier soit en position de force pour mener ses nombreux combats, a-t-il précisé.

Grâce à ce processus, les membres sont à même de prendre des décisions éclairées sur les orientations, les campagnes et les prochains projets du syndicat. »

Unifor célébrera l’an prochain son 10e anniversaire, a fait remarquer M. Poirier.

« En 2013, lors de la création d’Unifor, nous étions tous très enthousiastes quant à l’avenir du mouvement syndical et notre place au sein de celui-ci, a-t-il déclaré. Certes, dans cette courte période, nous comptons de nombreuses grandes réalisations, et je dois dire que je suis encore plus enthousiaste en pensant à ce qui nous attend. »

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Len Poirier, National Secretary Treasurer

Le conseil a procédé à des élections et Shinade Allder (section locale 6005) a été réélue présidente du Conseil régional de l’Ontario, Brian Chapman (section locale 27) a été élu vice-président et Balkar Bains (section locale 4457) secrétaire-trésorier.

Huit membres ordinaires ont été élus, dont Cindy Hasler (section locale 504), Dana-Anne James (section locale 6006), Debbie Montgomery (section locale 4268), Marc Brennan (section locale 707), Jordan Lennox (section locale 199), Corey Dalton (section locale 1090), Alicia Rivera (section locale 1106) et Carleen Finch (section locale 87-M).

« Le fait que des membres de la communauté des travailleuses et travailleurs noirs, autochtones et de couleur soient élus à ces postes est particulièrement significatif, a déclaré Mme Allder. La représentation est importante.»

Voyez tous ceux et celles qui ont été élus.

Le conférencier principal, le Dr Adil Shamji, médecin urgentologue à l’hôpital Michael Garron de Toronto et porte-parole libéral de l’Ontario en matière de soins de santé, a reproché au gouvernement Ford de faire passer la privatisation du système de soins de santé avant les patients.

Le Dr Shamji mentionne que les temps d’attente accrus, l’alourdissement de la charge de travail et les épidémies liées à la Covid-19 dans les foyers de soins de longue durée entraînent davantage de décès, et sont autant de conséquences des cliniques à but lucratif qui mettent le système public sous respirateur artificiel.

« Le système s’effondre parce que ce gouvernement sape les soins de santé publics et permet aux intérêts à but lucratif de s’immiscer dans le système », a déclaré le docteur.

Dans le courant de l’après-midi, un groupe de membres a pris place devant la foule, toutes et tous vêtus d’une cape noire et portant des pierres tombales en carton sur lesquelles on pouvait lire, entre autres, les inscriptions suivantes : « RIP mental health support » (Adieu le soutien en matière de santé mentale), « RIP public education » ( Adieu l’éducation publique) et « RIP good paying Canadian jobs » ( Adieu les emplois canadiens bien rémunérés), ce qui illustre de façon saisissante l’état des services sociaux en Ontario.

Le directeur du Service de la recherche du syndicat, Angelo DiCaro, a parlé de la Politique automobile d’Unifor, lancée lors du congrès d’Unifor en août, et a expliqué la position du Canada en matière de véhicules électriques.

« Les États-Unis vendent actuellement environ 600 000 véhicules électriques par an a-t-il affirmé. Au cours des sept prochaines années, on s’attend à ce que ce nombre atteigne neuf à dix millions de véhicules par an, soit environ 15 % de leur marché, ce qui est extraordinaire. »

D’ici 2030, à l’échelle mondiale, ce sont 1,2 billion de dollars qui seront consacrés par les constructeurs automobiles à la production de nouveaux véhicules électriques à batterie plutôt que de moteurs à combustion interne.

Sur ce, M. DiCaro a décrit les cinq grands piliers de la réussite des véhicules électriques au Canada - y compris la façon de faire croître l’industrie nationale et de gérer la transition vers le net zéro - ainsi que les 29 recommandations de la Politique automobile d’Unifor qui obligeront le gouvernement à rendre des comptes sur l’articulation d’une stratégie industrielle, la concentration des investissements dans la chaîne d’approvisionnement totale et le soutien des travailleuses et travailleurs canadiens, y compris les 40 000 membres d’Unifor employés dans le secteur de l’automobile.

« D’ici 2030, nous prévoyons que les investissements dans ce secteur atteindront près de 50 milliards de dollars au Canada, ce qui permettra de soutenir 250 000 personnes dans la chaîne d’approvisionnement des VE - un résultat exceptionnel, compte tenu de la trajectoire descendante des emplois au cours des dernières années », a ajouté M. DiCaro.

La présidente du Conseil régional de l’Ontario, Shinade Allder, a remercié les déléguées et les délégués et a clos le Conseil régional de l’Ontario en faisant le vœu de poursuivre la lutte au nom des travailleuses et travailleurs de l’Ontario.

Shinade Allder, Local 6005 ORC Chair
Brian Chapman, Local 27 ORC Vice Chair
Balkar Bains, Local 4457 ORC Secretary-Treasurer