Le projet de loi 60 est une voie périlleuse pour l’Ontario

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Two health care workers only visible from the neck down, both with stethoscopes, with arms folded. Hospital beds are in the background.
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Kelly-Anne Orr, adjointe aux dirigeantes et dirigeants nationaux d’Unifor, met en garde contre le projet de loi 60 du gouvernement de l’Ontario qui exacerbera la crise actuelle touchant le système de santé plutôt que de la soulager.

Le 20 mars dernier, elle a présenté un mémoire au Comité permanent de la politique sociale du gouvernement de l’Ontario portant sur le projet de loi 60, la Loi concernant votre santé, laquelle vise à élargir la privatisation des services hospitaliers aux organisations à but lucratif.

« Cette décision politique n’est pas dans l’intérêt de la population ontarienne ni de notre système de santé, a-t-elle déclaré. La voie dans laquelle s’engage ce gouvernement est périlleuse. Les travailleuses et travailleurs de la santé, les syndicats, les groupes communautaires et les médias ont tous dénoncé les effets néfastes de la privatisation des services de santé. »

Dans ses observations, elle a indiqué que le projet de loi 60 a été déposé en pleine crise alors que le système de santé et les travailleuses et travailleurs du secteur ont été poussés à la limite de leurs capacités.

Cette loi qui prétend remédier aux problèmes comme les temps d’attente pour les interventions chirurgicales, les procédures médicales et l’imagerie diagnostique ne va rien régler. Elle ne fera qu’aggraver la crise en privant de ressources le système public de soins de santé.

Dans nos hôpitaux publics, les blocs opératoires et les laboratoires continuent d’être sous‑utilisés. L’accès aux interventions chirurgicales et aux procédures pourrait être amélioré si le gouvernement décidait de prendre les mesures nécessaires.

Pendant ce temps, l’Ontario continue de fournir le plus faible ratio de financement par habitant aux hôpitaux publics et au système de soins de santé au Canada, a-t-elle précisé.

La transparence et la reddition de comptes au public sont également un problème.

Cette loi ne fait pas obstacle à la pratique déloyale de surenchère et n’établit aucune norme en la matière. Elle vise la population ontarienne financièrement vulnérable qui reçoit des services dans des cliniques privées à but lucratif. Elle se traduit également par une concurrence accrue pour la main-d’œuvre qualifiée dans deux systèmes différents alors qu’il existe déjà des pénuries massives de personnel.

« Lorsque les profits deviennent une motivation, la dépendance à l’égard des cliniques privées crée davantage d’inefficacités dans le système de soins de santé, a observé Kelly‑Anne Orr dans son mémoire. La recherche de rentabilité mène inévitablement à des réductions des coûts qui peuvent se traduire par une réduction des effectifs ou d’autres mesures qui ont un impact sur la qualité des soins. Ces motivations amèneront forcément la population ontarienne à payer davantage d’impôts et à faire les frais de la surenchère de services. »

Le projet de loi 60 soulève également des questions concernant la responsabilité publique des fournisseurs de services, notamment en autorisant le ministre à nommer une directrice ou un directeur, qui peut être toute personne ou entité, s’écartant ainsi de l’exigence actuelle selon laquelle ce poste doit être occupé par un employé du ministère.

« Une directrice ou un directeur tiers ne serait pas assujetti aux directives relatives aux conflits d’intérêts et à l’éthique qui s’appliquent aux fonctionnaires, a précisé Kelly‑Anne Orr. Cette personne ne serait pas assujettie aux exigences relatives à la divulgation des renseignements financiers ou à l’accès du public à l’information ».

Outre son manque de transparence, cette loi ne renferme pas non plus de dispositions relatives à une surveillance publique des représentants élus. Par exemple, il n’y a aucune mesure relative aux avis publics, à l’obligation d’obtenir l’approbation du cabinet ou à une période de préavis. En d’autres termes, cette loi favorisera la multiplication rapide des cliniques privées, sans qu’elles ne fassent l’objet d’une surveillance étroite ou de consultations publiques.

« Il existe des solutions pour remédier à la pénurie de personnel et aux retards touchant les interventions chirurgicales et les procédures diagnostiques dans les provinces, a mentionné Kelly-Anne Orr. Il faut notamment investir dans le recrutement et le maintien des effectifs dans les hôpitaux publics dans l’ensemble du système. »

À son avis, la privatisation n’est pas la solution. Cette loi permettra au gouvernement d’accélérer la délivrance de permis aux cliniques privées, tout en conférant davantage de pouvoir discrétionnaire à des personnes ou à des entités tierces, moins redevables à la population.

« Le projet de loi 60 apportera des changements importants au système de santé de la province en permettant aux cliniques privées d’offrir davantage de services, alors qu’elles sont assujetties à une reddition de comptes et à une surveillance publique moindres que ne le sont les hôpitaux publics, a-t-elle expliqué. Ces mesures ne renforceront pas notre système de santé, mais affaibliront plutôt nos hôpitaux publics, au détriment des patients et des contribuables ontariens. »

Consultez le mémoire d’Unifor présenté au Comité permanent de la politique sociale sur le projet de loi 60.