Partager
Parfois, pour que de grandes idées puissent germer, il suffit de planter une graine.
Cette année, la Conférence des travailleuses et travailleurs noirs, autochtones et de couleur (TTNAC) s’est déroulée sous le thème « Unies et unis pour la guérison, la paix et la solidarité ». Les déléguées et délégués ont été invités à partager des idées novatrices sur les stratégies communautaires en vue de faire tomber les barrières.
« Nous sommes la terre. C’est tout ce que nous portons en nous qui va nous permettre de grandir ensemble. Nous avons besoin de racines solides pour acquérir de la force et nous allons travailler ensemble pour y parvenir », a déclaré la représentante des droits de la personne d’Unifor, Tricia Wilson.
« Nous devons nous rappeler que d’autres groupes, bien que moins visibles, subissent de graves préjudices et qu’il est essentiel d’élever toutes les voix. »
La Conférence TTNAC de cette année, qui s’est tenue au Centre familial d’éducation d’Unifor à Port Elgin, en Ontario, du 25 au 27 octobre 2024, a connu sa plus forte participation jusqu’à présent, le nombre de personnes présentes atteignant près de 200 personnes.
« C’est votre maison », a déclaré Dereck Berry, membre TTNAC du Conseil exécutif national d’Unifor, aux déléguées et délégués. « Il s’agit d’un endroit sûr ».
Dans son allocution, la présidente nationale d’Unifor, Lana Payne, a remercié les membres du Comité des travailleuses et travailleurs noirs, autochtones et de couleur élus dans toutes les régions pour leur travail visant à renforcer le syndicat et à tisser des liens entre les membres des communautés des travailleuses et travailleurs noirs, autochtones et de couleur dans tous les endroits où le syndicat est présent. Elle a également encouragé les sections locales à faire une demande de financement au titre du Fonds d’équité des sections locales.
Le mois dernier, Mme Payne s’est jointe à l’agente de liaison d’Unifor pour les questions autochtones, Gina Smoke, dans le cadre du projet Drag the Red, à Winnipeg, pour ratisser la rivière à la recherche de femmes et de filles autochtones disparues et assassinées.
« Je ne saurais vous dire à quel point cette expérience a été difficile pour moi. Mais j’ai aussi trouvé extraordinaire de voir ces femmes transformer leur souffrance et leur peine en action – une action de guérison, d’espoir et de réconciliation », a-t-elle déclaré.
« Que vous marchiez dans le cadre de la course à relais Tears to Hope, que vous participiez à un événement dans le cadre du Mois de l’histoire des Noirs, que vous meniez une campagne sur l’équité dans votre section locale, ou que vous luttiez contre la haine anti-asiatique, je veux que vous continuiez à vous servir de ce syndicat comme un moyen de faire de ce monde un endroit meilleur pour chacun d’entre nous. »
Mme Payne a également souligné que le syndicat protégerait avec véhémence la libre négociation collective et le droit de grève. Malgré l’adoption par le gouvernement fédéral d’une loi anti-briseurs de grève au début de l’année, le droit de grève est menacé.
Si les employeurs ou un gouvernement conservateur venaient qu’à tenter d’étouffer les droits à la négociation collective ou le droit de grève, « je peux vous garantir que ce serait un moyen infaillible de mettre le feu à la paix sociale dans ce pays », a déclaré Mme Payne.
« Nous ne reculerons pas. »
Le vendredi soir, l’Aînée Shirley John a ouvert la conférence en souhaitant la bienvenue aux Autochtones et en présentant un puissant cercle de tambours.
Dans son allocution, la directrice de la région de l’Ontario d’Unifor, Samia Hashi, a souligné aux déléguées et délégués que le travail qu’ils accomplissent sur les lieux de travail et dans leurs collectivités « permet de repousser les plafonds de verre et de bâtir un avenir plus solide pour chacun et chacune d’entre nous ».
« Quand je pense à la dernière année, je constate que nous en avons fait beaucoup. Nous avons accompli beaucoup de choses ensemble en tant que syndicat », a-t-elle déclaré.
« Pour la première fois, nous avons organisé notre Mois national de l’histoire des Noirs et réuni des membres d’un bout à l’autre du pays. Notre Comité TTNAC est intervenu à chaque étape pour soutenir des événements importants – l’élimination du racisme et de l’islamophobie, la célébration de la Journée nationale des peuples autochtones et l’hommage rendu à la perte des enfants et aux survivants des pensionnats autochtones lors de la Journée nationale de la vérité et de la réconciliation. »
Elle a ajouté qu’à l’avenir, il est essentiel que les membres TTNAC participent en tant qu’électeurs.
« Les questions dont nous parlons – l’abordabilité, le logement et les soins de santé, les droits des Autochtones, les politiques anti-Noirs – sont toutes des choses sur lesquelles nous voulons agir, a-t-elle déclaré. Nous devons également soutenir les dirigeantes et les dirigeants progressistes, dont les valeurs correspondent aux nôtres. »
Plus tard dans la soirée, les déléguées et délégués ont entendu un groupe d’experts leur expliquer comment le syndicat et ses membres peuvent avoir un grand impact dans les bureaux de vote et créer un véritable changement, notamment en désignant des champs de bataille pour des opérations énergiques de porte-à-porte et des campagnes d’envoi de textos.
Le deuxième jour de la conférence, Nrinder Nann, première personne de couleur élue au conseil municipal de Hamilton, a fait part de son parcours d’organisatrice communautaire à conseillère municipale. Elle a parlé de son travail de lutte contre la haine et le racisme dans les communautés et sur les lieux de travail, qui a été motivé par l’assassinat haineux d’un aîné sikh en Colombie-Britannique par des suprémacistes blancs en 1998.
Sa carrière d’une dizaine d’années au sein du mouvement syndical au Canada et aux États-Unis, notamment aux côtés de Bob White, dirigeant du syndicat des Travailleurs canadiens de l’automobile (TCA), l’a finalement amenée à contribuer à la première campagne présidentielle de Barack Obama aux États-Unis, où elle a pu constater que la plupart des travailleuses et travailleurs étaient des Noirs et des personnes de couleur et que « nous n’étions pas l’exception dans la salle ».
Toutefois, c’est la prise de conscience de la nécessité de prendre soin de soi, en particulier dans les groupes marginalisés, qui est importante, car « si nous ne pouvons pas prendre soin de nous-mêmes, nous ne pouvons pas nous battre pour les autres », a-t-elle déclaré.
Le passage de Mme Nann à la politique a commencé à la ville de Toronto, où elle a reconnu son besoin de « lutter de l’intérieur pour apporter des changements tangibles ». Elle a été élue conseillère du quartier 3 de Hamilton en 2022.
« Les solutions aux problèmes croissants [qui affectent la] communauté ne viendront pas des personnes qui observent l’oppression. Elles viendront de ceux qui la vivent », a-t-elle affirmé.
« Je suis honorée de servir, mais je dois vous dire que ce n’est pas facile. Il y a beaucoup de haine, beaucoup de critiques, a-t-elle ajouté. Il ne s’agit pas de titres ou de positions de pouvoir, mais de l’impact que nous pouvons avoir. Ce qui compte, ce sont les vies que nous allons changer. »
Unifor a remis un chèque de 1 000 $ à Mme Nann pour soutenir SACHA, un centre d’aide aux victimes d’agressions sexuelles qui dessert Hamilton et ses environs.
Le South Asian Women and Immigrants’ Services (SAWIS) a fait entendre les difficultés et les conditions pénibles auxquelles les nouveaux arrivants sont confrontés au Canada, notamment l’impossibilité de trouver un logement abordable, d’accéder à des services de garde d’enfants, à un salaire décent dans un lieu de travail sûr et à l’assurance-emploi.
« Nous avons besoin de notre dignité, nous avons besoin des droits de la personne », a déclaré Sultana Jahangir, directrice exécutive des SAWIS. « Nous nous battons pour cette justice sociale. »
Le Conseil régional de l’Ontario a fait un don de 2 500 $ aux SAWAIS pour soutenir leurs programmes et leur travail.
Les déléguées et délégués ont participé à deux ateliers sur la santé mentale et la justice raciale, ainsi que sur la solidarité de la communauté syndicale.
La conférencière invitée Vera Cheng, travailleuse sociale autorisée, a approfondi la question du démantèlement du racisme anti-asiatique. Elle a partagé sa propre expérience du sentiment de « ne pas être à la hauteur » en grandissant avec des parents tigres, et a expliqué les dangers du mythe de la minorité modèle asiatique – un stéréotype qui a caractérisé la population asiatique comme étant très performante sur les plans de l’économie et de l’éducation.
« Les Canadiennes et Canadiens d’origine asiatique risquent davantage d’être confrontés à des problèmes de santé mentale en raison de l’augmentation du racisme et de la discrimination, et beaucoup de personnes d’origine asiatique ont ressenti la pression de devoir se conformer au stéréotype de la minorité modèle, ce qui peut aggraver leur santé mentale et, dans certains cas, les conduire au suicide », a-t-elle déclaré.
Mme Cheng a lancé la campagne de masques « Mettre fin au racisme anti-asiatique » en 2021, après la fusillade survenue dans un spa d’Atlanta, parce qu’elle voulait dénoncer la montée considérable du sentiment anti-asiatique et sensibiliser le public à ce problème.
« Après le début de la pandémie, plus de 1 500 crimes haineux ont été signalés contre la communauté asiatique au Canada et, malheureusement, les Autochtones que l’on prenait pour des Asiatiques ont également été victimes de crimes haineux », a-t-elle déclaré.
Elle a également proposé au groupe des ressources visant à élargir le dialogue sur l’auto-prise en chage et l’amour de soi – notamment la thérapie, la respiration et la régulation émotionnelle – et a guidé le groupe dans une méditation de cinq minutes.
Le dernier jour de la conférence, la directrice de la région de l’Ontario, Samia Hashi, a animé une table ronde sur le militantisme.
« Nous en avons assez d’être des spectateurs, nous voulons être entendus », a déclaré la panéliste Maria Chinelli de la section locale 222 d’Unifor. « Je veux faire partie de la solution. C’est pourquoi je me lève et j’essaie de jouer mon rôle. Si vous avez la passion et le courage... nous sommes des travailleuses et travailleurs de couleur. Nous avons la passion et le courage de faire changer les choses. »
Le panéliste Chris Santos, représentant national d’Unifor, a déclaré qu’il tirait les leçons des cours qu’il recevait au Centre familial d’éducation d’Unifor à Port Elgin et qu’il pouvait en faire profiter sa communauté en dehors du syndicat en prêchant par l’exemple.
« Les personnes de couleur attendent de moi que je sois leur voix, a-t-il déclaré. Le changement que nous apportons au monde ne se fait pas seulement sur le lieu de travail... La première chose que l’on sait, c’est que l’on a tout un train de solidarité derrière soi. »
Dans son discours de clôture, la représentante d’Unifor pour les droits de la personne, Tricia Wilson, a évoqué les nombreuses histoires de guérison, de solidarité et de paix partagées tout au long de la fin de semaine.
« Continuons à aller de l’avant, car nous n’allons certainement pas reculer! » a-t-elle conclu.
Cliquez ici pour voir la galerie photo de la Conférence TTNAC.