
Dans le secteur de la raffinerie, la fatigue est synonyme de danger.
Ces installations sont exploitées par des centaines de travailleurs hautement qualifiés, expérimentés et loyaux qui manipulent des matériaux qui sont parfaitement sûrs s'ils sont manipulés correctement, mais qui sont aussi explosifs et représentent un danger réel pour les travailleurs et les voisins si les choses tournent mal.
C'est la raison pour laquelle je trouve si déconcertant que le complexe de la raffinerie Co-op (CRC) de Regina pousse les négociations au bord d'un lock-out qui mettrait la collectivité en danger.
La médiation a été rompue entre les 800 hommes et femmes, membres de la section locale 594 d'Unifor, qui exploitent la raffinerie et la compagnie. Plutôt que de négocier une entente équitable, la compagnie a érigé des installations temporaires pour loger des travailleurs de remplacement (aussi appelés briseurs de grève) et des gestionnaires.
La Federated Co-op Limited (FCL) se lance dans une guerre contre sa propre main-d'œuvre, aux prises avec des briseurs de grève de l'extérieur de la province.
Pensez à ça. L'hiver s'installe partout en Saskatchewan, et le plan de la FCL pour assurer la sécurité de la zone de dynamitage est de mettre les briseurs de grève et les gestionnaires dans des remorques délabrées loin de leur famille, quelques semaines seulement avant les vacances.
Quelles mauvaises conditions de travail. Ce n'est pas que j'ai pitié des briseurs de grève qui font le travail de nos membres – je n’aurai jamais pitié d’eux –, mais les gens qui sont fatigués, stressés et loin de leur famille pendant les fêtes ne sont pas le genre de personnes que je voudrais voir diriger une raffinerie dangereuse dans ma cour arrière.
Aucun de ces briseurs de grève ne peut remplacer les compétences et l'expérience des membres de la section locale 594 d'Unifor, cette situation est volatile et dangereuse.
Je ne suis pas le seul à dénoncer à quel point la situation peut devenir dangereuse. Les propriétaires de la compagnie en ont déjà parlé. Le professeur agrégé Sean Tucker a fait une présentation lundi à Regina sur les risques réels si quelqu'un d'autre que les travailleuses et travailleurs de la section locale 594 d’Unifor travaille à la raffinerie.
FCL a mis en garde à plusieurs reprises contre les dangers de la fatigue.
« Quand on est fatigué, ce n'est pas le bon moment de faire fonctionner de la machinerie lourde ou d’entretenir un endroit aussi sensible à la sécurité, vous savez, qu’une raffinerie », a déclaré Vic Huard, vice-président de la FCL, à une station radio de la Saskatchewan en 2017. Et un précédent vice-président, Bud Van Iderstine, a déclaré en 2011 dans une lettre à la Ville : « Le CRC croit que la ville ne devrait pas permettre un développement résidentiel dans ce secteur de Regina, et devrait établir une distance raisonnablement importante entre les développements résidentiels et les installations industrielles. » (Regina Leader-Post, 18 mars 2018)
La FCL a même mis en garde contre les dangers pour les ensembles résidentiels avoisinants, avisant la province et la Ville qu'il faut « une distance raisonnablement importante pour les ensembles résidentiels » et qu'elle était « déçue » de voir des logements construits si près de l'installation.
Malgré tout, la FCL dépense des millions de dollars pour mettre sur pied un camp de briseurs de grève sur place afin d'essayer de faire fonctionner cette énorme installation. C'est un scénario parfait pour provoquer le surmenage et la fatigue des travailleurs qui essaient contre toute attente de faire fonctionner en toute sécurité une installation qui ne leur est pas familière.
En d'autres termes, c’est la situation exacte contre laquelle la FCL met en garde la population depuis des années – et si loin des racines admirables de la FCL.
La Federated Co-op Ltd. a été fondée sur le principe selon lequel il faut travailler pour les gens de la Saskatchewan, en particulier les petites collectivités. À une époque où les grandes sociétés exploitaient les ressources, les travailleurs et les agriculteurs de la province, le mouvement coopératif a commencé à garder les profits au pays.
C'est cet esprit des gens avant les profits qui a bâti la Saskatchewan et fait de l'Ouest ce que la région est devenue aujourd'hui.
Les raffineurs assurent le fonctionnement des collectivités de l'Ouest canadien. Les produits de qualité et fiables qu'ils fabriquent font rouler des véhicules sur toutes les routes et autoroutes des Prairies, en fait partout au pays. Les 130 000 barils traités chaque jour alimentent les fermes qui nourrissent le monde.
Grâce à leur travail, le reste d'entre nous peut se rendre au travail et y revenir. Leur salaire retourne directement dans la collectivité, par l'argent dépensé dans les magasins et les restaurants locaux, ce qui permet de garder plus d'emplois en vie dans la collectivité. Des pensions sûres assurent qu’après la retraite, ils continuent de dépenser localement.
En s'attaquant à ses propres travailleuses et travailleurs, et en éviscérant leurs pensions garanties, la FCL poursuit des objectifs inverses et agit comme les grandes sociétés cupides contre lesquelles elle a été créée pour leur résister.
La compagnie réalise déjà un bénéfice de 3 millions de dollars par jour. Combien est-ce suffisant? Combien d'autres profits veulent-ils ? Nous disons qu'il y a toujours assez d’argent pour respecter les travailleuses et travailleurs de la raffinerie. Et l'économie locale mérite que l'argent de cette raffinerie soit utilisé pour bâtir la communauté et la garder en sécurité.
La FCL tient de beaux discours sur l'investissement dans les collectivités. J'imagine que cela signifie aussi investir dans des camps de briseurs de grève et de travailleurs de remplacement de l'extérieur de la province qui nous exposent tous à des risques.
La FCL doit retourner à la table de négociation et négocier une entente équitable. Au lieu de diviser la communauté, la raffinerie Co-op devrait se rappeler les principes sur lesquels elle a été fondée pour protéger les communautés et la province. Si c'est ainsi qu'elle traite ses loyaux travailleurs et travailleuses, il est peut-être temps que nous fassions tous affaire ailleurs.