Établir un régime d’assurance-emploi inclusif, équitable et résilient pour les travailleuses et travailleurs au Canada

SOMMAIRE

Juin 2021

La pandémie de COVID-19 a eu un effet dévastateur sur l’économie, les travailleurs et les familles du Canada. Les gouvernements ont fermé des entreprises afin de freiner la propagation du virus et de sauver des vies, laissant des millions de travailleuses et de travailleurs mis à pied sans revenu. Seulement en mars et avril de l’an dernier, le Canada a perdu près de 3 millions d’emplois. Naturellement, ces travailleurs se sont tournés vers le seul programme gouvernemental qui était censé les aider en période de difficultés financières : l’assurance-emploi.

Toutefois, il est rapidement devenu évident que le régime d’assurance-emploi du Canada, caractérisé par ses critères d’admissibilité restrictifs, ses faibles taux de prestations et ses lacunes importantes en matière de couverture, n’offrirait pas le filet de sécurité dont les chômeurs avaient besoin.

Ce fait ne surprend pas les défenseurs des droits des travailleurs et des communautés, ceux qui se font les champions des solutions visant à rétablir les prestations d’assurance-emploi pour protéger les travailleuses et travailleurs, tout en modernisant le régime pour qu’il reflète les réalités du marché du travail actuel de plus en plus précaire.

La reconstruction du filet de sécurité sociale du Canada est un élément clé pour rebâtir en mieux. En tant que principal stabilisateur économique anticyclique du Canada, des solutions et des correctifs permanents à l’assurance-emploi sont nécessaires pour que les travailleuses et travailleurs soient mieux protégés lors de la prochaine crise économique. Le moment est venu d’apporter des changements significatifs et transformateurs pour créer un régime d’assurance-emploi équitable, accessible et inclusif.

Pour y parvenir, il faudra repenser fondamentalement le rôle que jouent les programmes de sécurité du revenu dans notre société, un rôle qui s’éloigne du cadre actuel qui décourage, restreint et pénalise ceux et celles qui cherchent de l’aide et qui considère les bénéficiaires des prestations comme des fraudeurs potentiels.

Les programmes nationaux de sécurité du revenu doivent servir tous les travailleurs et travailleuses. Ils doivent être fondés sur des principes clés d’universalité, d’accessibilité, d’équité, de justice, de flexibilité, de compassion et de simplicité, et comme l’expérience de la COVID-19 nous l’a appris, ils doivent être à la fois bien financés et être là pour les travailleurs lorsqu’ils en ont besoin.

L’assurance-emploi doit revenir à ses racines, c’est-à-dire redevenir un régime de prestations sociales facile à comprendre, accessible et inclusif, fondé sur la sécurité économique, et non sur des principes actuariels. Les récents changements apportés par le gouvernement fédéral à l’assurance-emploi ont suscité beaucoup d’optimisme alors que notre régime d’assurance-emploi connaîtra très bientôt des réformes essentielles. Tandis que le marché du travail canadien devient de plus en plus précaire et que l’avenir professionnel des travailleurs est incertain, le besoin d’établir un régime d’assurance-emploi renforcé n’a jamais été aussi grand.

SOMMAIRE DES RECOMMANDATIONS

1. Critères d’admissibilité à l’assurance-emploi

  • Améliorer l’accessibilité à l’assurance-emploi en remplaçant la norme variable d’admissibilité par une exigence normalisée d’admissibilité de 360 heures dans tout le Canada et baser les heures et la durée d’admissibilité pour les demandes existantes sur la période la plus favorable.
  • Éliminer toutes les disqualifications pour avoir quitté son emploi afin de retourner aux études ou de s’occuper de responsabilités familiales et supprimer la disqualification en cas de congédiement ou de démission.
  • Éliminer l’attribution des indemnités de départ, y compris l’affectation des indemnités de départ et de cessation d’emploi au début d’une demande d’assurance-emploi et supprimer les mesures de récupération de l’aide sociale.
  • Veiller à ce que les règles de travail pendant une période de prestations ne récupèrent pas les prestations dès le premier dollar de gains, et garantir l’accès aux prestations pour les travailleurs qui occupent plusieurs emplois à temps partiel.
  • Travailler avec les ministères et organismes fédéraux concernés pour s’assurer que tous les travailleurs migrants au Canada ont un accès complet aux prestations régulières et spéciales de l’assurance-emploi, aux permis de travail ouverts et au statut d’immigrant permanent.
  • Élargir les prestations d’assurance-emploi pour couvrir de plus longues périodes de congé pour violence conjugale ou sexuelle.
  • Élargir l’accès à l’assurance-emploi pendant les conflits de travail, y compris un lock-out.
  • Augmenter le seuil de recouvrement et de récupération de l’impôt sur l’assurance-emploi.

2. Prestations d’assurance-emploi

  • Éliminer de façon permanente le délai de carence d’une semaine pendant lequel aucune prestation n’est payable.
  • Augmenter la durée des prestations à 50 semaines dans toutes les régions du pays.
  • Étendre la durée des prestations de maladie de l’assurance-emploi à 50 semaines, explorer des façons de créer une plus grande flexibilité dans le versement des prestations, et favoriser les programmes de congé de maladie en milieu de travail parrainés par l’employeur.
  • Éliminer la limite de 50 semaines pour les prestations spéciales et les prestations de chômage combinées et étendre la période de référence et de prestations à au moins 104 semaines.
  • Garantir un plancher minimal de 500 $ pour les prestations d’assurance-emploi.
  • Augmenter le taux de remplacement du revenu à 75 % de la rémunération antérieure (actuellement de 55 %) et relever le plafond de la rémunération assurable.
  • Élargir le programme Action Compétences pour permettre aux chômeurs de s’inscrire à des programmes éducatifs à temps plein sans perdre leurs prestations d’assurance-emploi.
  • Améliorer l’Allocation canadienne pour la formation afin de renforcer l’apprentissage continu.
  • Encourager l’adoption de régimes de prestations supplémentaires de chômage en milieu de travail.
  • Élargir le programme de travail partagé de l’assurance-emploi.

3. Administration du régime d’assurance-emploi

  • Renouveler le soutien au dialogue tripartite entre les syndicats, les employeurs et le gouvernement sur les questions d’assurance-emploi et de soutien transitoire du marché du travail.
  • Prioriser le financement des centres d’aide aux chômeurs et instituer un financement de base pluriannuel.
  • Revoir le financement du programme d’assurance-emploi et rétablir les contributions fédérales.
  • Revenir à un modèle tripartite de conseil arbitral de l’assurance-emploi pour les appels de premier niveau, en mettant en place des mécanismes de rapport appropriés.
  • Rétablir les agents régionaux du programme de liaison de l’assurance-emploi.

4. Autre

  • Entreprendre immédiatement une consultation multipartite complète sur l’élargissement de la couverture de l’assurance-emploi et le financement des prestations d’assurance-emploi afin d’inclure les travailleurs autonomes, les pigistes, les entrepreneurs indépendants et les travailleurs à la demande.