Lettre au Premier ministre Trudeau sur la crise dans le secteur de l’hôtellerie au Canada

Partager

Le 30 novembre 2020

ENVOYÉ PAR COURRIEL
Le très honorable Justin Trudeau, C. P., député
Premier ministre du Canada
Chambre des Communes
@email

Objet : Crise dans le secteur de l'hôtellerie au Canada

Monsieur le Premier ministre,

Alors que l'hiver approche et que les taux d'infection à la COVID-19 continuent d'augmenter à un rythme alarmant, certaines industries de l'économie canadienne sont au bord d'un second effondrement. Si certains secteurs semblent rebondir, notamment le commerce de détail, le transport maritime, la logistique et l'entreposage, ainsi que la construction résidentielle, de nombreux autres secteurs restent confrontés à un long cheminement incertain vers la reprise.
L'industrie hôtelière canadienne est l'un de ces secteurs en difficulté. En fait, l'industrie de l'hébergement a été parmi les premiers et les plus touchés et sera probablement l'un des derniers secteurs à connaître une reprise complète. Les employeurs de l'industrie hôtelière nous ont dit qu'ils prévoient une période d'au moins deux à trois ans pour une telle reprise. Après une brève reprise des activités à la fin de l'été, la deuxième vague de la pandémie et la fin de la saison touristique se sont combinées, comme prévu, pour créer un deuxième effondrement du secteur hôtelier. À l'approche de la saison des vacances, certains de nos hôtels affichent des taux d'occupation de 10 % ou moins.

L'effondrement du secteur hôtelier canadien a eu un effet désastreux sur les travailleuses et travailleurs de l'hôtellerie dans tout le pays. Les travailleuses et travailleurs syndiqués et non syndiqués du secteur hôtelier ont connu des mises à pied prolongées et même des congés forcés permanents. Alors que les mises à pied se poursuivent, de nombreux membres perdent l'accès à leurs avantages, y compris leur assurance-médicaments, une crise imminente que notre syndicat a évoquée avec vous dans une lettre envoyée le 19 août.

Nous continuons à tirer la sonnette d'alarme sur cette crise de la couverture des médicaments, en partie parce que nous savons que lorsque les Canadiennes et Canadiens perdent l'accès aux soins de santé réguliers, y compris aux médicaments sur ordonnance, leur traitement médical devient beaucoup plus coûteux pour le système, en raison du coût plus élevé des soins d'urgence et de courte durée. Les travailleuses et travailleurs de l'hôtellerie qui ont la chance d’avoir des heures de travail prévues subissent une perte de revenus en raison de la diminution des heures de travail et des pourboires.

Le programme de la PCU a été une bouée de sauvetage essentielle pour de nombreux travailleurs et travailleuses du secteur de l’hôtellerie, et nous sommes reconnaissants du soutien qu'il leur a apporté ainsi qu’à leurs familles. Cependant, les changements apportés au programme de la SSUC ont fait que les bénéficiaires de ce programme sans heures de travail prévues – c'est-à-dire ceux qui reçoivent la subvention la PCU mais ne travaillent pas activement – reçoivent maintenant une prestation d'assurance-emploi beaucoup nettement inférieure, un montant bien trop faible pour soutenir une ou un travailleur ou sa famille. Alors que les travailleuses et travailleurs de l'hôtellerie s'attendent à de nombreux mois de mises à pied, leur avenir financier s'annonce sombre.

Le profil démographique particulier de la main-d'oeuvre hôtelière rend cette crise encore plus inquiétante. Par rapport à l'ensemble de la main-d'oeuvre canadienne, les travailleuses et travailleurs de l'hôtellerie sont plus souvent des femmes, des néo-Canadiens, des personnes de couleur, des jeunes travailleurs et des travailleurs à bas salaires ou précaires. Cela signifie que lorsque le secteur est en difficulté, les effets négatifs se font sentir de manière disproportionnée sur les Canadiennes et Canadiens qui sont déjà trop souvent laissés pour compte. Mais le revers de cette dynamique est que lorsque nous aidons l'industrie hôtelière canadienne à prospérer, nous aidons également les Canadiennes et Canadiens qui méritent le plus de soutien.

En Colombie-Britannique, le gouvernement a créé un groupe de travail pour aider à orienter la réponse de la province à la pandémie pour le secteur du tourisme et de l'hôtellerie. Nous sommes heureux de constater que Gavin McGarrigle, directeur régional de l'Ouest d’Unifor, a un siège à cette table. Le groupe de travail sur le tourisme en Colombie-Britannique utilise une approche en trois volets dans son plan pour le secteur, et Unifor recommande une approche similaire dans tout le pays. Les trois axes sont les suivants : mesures de santé et de sécurité qui contribueront à rétablir la confiance dans le secteur, soutien à la main-d'oeuvre et soutien aux employeurs.

Sur la base de cette approche à trois volets et forts de notre expérience en tant que plus grand syndicat canadien dans le secteur de l’hôtellerie et du jeu, nous demandons respectueusement au gouvernement fédéral d'adopter les recommandations suivantes :

  • Travailler avec les provinces pour développer, mettre en oeuvre et financer des programmes d’assurance-médicaments d'urgence afin que les travailleuses et travailleurs de l'hôtellerie puissent continuer à avoir accès à des médicaments vitaux ;
  • Réviser le programme de la SSUC de manière à ce que les travailleuses et travailleurs réguliers et non réguliers reçoivent le même niveau d’aide financière;
  • Fournir un soutien financier à nos employeurs du secteur de l'hôtellerie (y compris des prêts sans intérêt, des garanties de prêt ou des mesures équivalentes), en fonction des exigences de maintien en poste des travailleuses et travailleurs, afin que les travailleuses et travailleurs du secteur de l'hôtellerie puissent retourner au travail avec les salaires et les conditions de travail d'avant la pandémie;
  • Investir dans des programmes de formation et de renforcement des compétences, afin d'offrir à la main-d'oeuvre hôtelière canadienne de meilleures possibilités d'emploi au sein et en dehors de l'industrie.

Unifor est prêt à collaborer avec les employeurs du secteur hôtelier, les groupes industriels, le mouvement syndical au sens large, les gouvernements provinciaux et fédéral, les communautés autochtones, les représentants d'autres secteurs durement touchés et d'autres parties prenantes, afin d'élaborer un plan de relance global, stratégique et inclusif pour le secteur de l’hôtellerie.

Comme toujours, n'hésitez pas à nous contacter si vous avez des questions ou des préoccupations.
Sincèrement,


Jerry Dias
président national d'Unifor

CC : L'honorable Chrystia Freeland, C.P., députée, vice-première ministre et ministre des Finances.
Conseil de l’hôtellerie et du jeu d’Unifor