Lettre à Sarah Davis, présidente Les Compagnies Loblaw limitée, sur le retrait de la prime de pandémie aux travailleuses et travailleurs de première ligne

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Le 15 juin 2020

ENVOYÉE PAR COURRIEL

Madame Sarah Davis

Présidente, Les Compagnies Loblaw limitée

 

Chère Madame,

Je vous écris pour vous faire part de mes préoccupations concernant la note que vous avez envoyée le 12 juin dernier aux employés de Loblaw, dont des milliers de membres d'Unifor.

Permettez-moi de commencer par dire que je suis stupéfait par votre témoignage exprimant choc, consternation et déception concernant l'attention négative dont Loblaw a fait l'objet ces derniers jours, après avoir mis fin à son programme de primes salariales essentielles pour les employés.

Pour commencer, cette pandémie est loin d'être terminée. Que vous classiez la prime de 2 $ de l'heure comme « prime de service essentiel » ou « prime de risque » ne fait aucune différence et passe à côté de l'essentiel.

Le travail en supermarché est essentiel, point final.

Les compétences, le dévouement et l'engagement des travailleuses et travailleurs – jeunes et âgés – pour faire croître et soutenir cette industrie sont largement sous-estimés.  

Madame Davis, vous comprenez certainement que vos supermarchés emploient principalement des travailleuses et travailleurs dont le salaire est égal, proche ou (dans le cas des étudiants) inférieur au salaire minimum général fixé par la législation provinciale.

Il ne s'agit pas d'une rhétorique incendiaire ou fallacieuse. C’est malheureusement la réalité.

Vous devez également savoir qu'au fil des décennies, Loblaw a délibérément réduit ses effectifs d'emplois à temps plein dans les magasins, des emplois qui offrent les salaires les plus élevés et le plus grand accès aux avantages sociaux dans l'industrie. Au lieu de cela, Loblaw compte trop sur les travailleuses et travailleurs à temps partiel pour exploiter ses magasins. En fait, l'année dernière encore, votre société a annoncé un plan de restructuration qui a supprimé plus de 20 % de tous les emplois à temps plein dans les supermarchés de la province de Terre-Neuve-et-Labrador – avec l'intention que les travailleuses et travailleurs à temps partiel prennent le relais. Pour de nombreux employés de ces magasins, les salaires n'ont pas suivi le rythme de l'inflation au cours des dernières décennies. Dans certaines épiceries appartenant à Loblaw au Canada, 90 % de l'ensemble du personnel travaille aujourd'hui à temps partiel.

Laissez-moi vous assurer qu'il ne s'agit pas de désinformation. C'est la vérité qui concerne le plus grand détaillant du Canada, une entreprise qui a réalisé un milliard de dollars de bénéfices nets rien que l'année dernière. C'est ce qui motive l'indignation dont vous êtes témoins, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de l'entreprise.

J'ai été surpris de lire les commentaires du président exécutif de Loblaw, Galen Weston, concernant son soutien à la législation sur le salaire minimum vital. C'est un objectif que notre syndicat partage, et j'apprécie son sentiment. Toutefois, à l'instar des membres d'Unifor, j'apprécierais que l'on passe à l’action plutôt que de se contenter de sentiments.

Pas une seule fois je n'ai entendu M. Weston dénoncer la décision du gouvernement Ford de supprimer le salaire minimum de 15 dollars en Ontario. Pas une seule fois je n'ai entendu Loblaw proposer une recommandation sur le salaire vital lors de la révision du salaire minimum à Terre-Neuve-et-Labrador l'année dernière.

Les Canadiennes et Canadiens n'ont pas besoin que les dirigeants de Loblaw, qui gagnent eux-mêmes des millions de dollars chaque année, parlent du salaire vital à leurs employés lorsqu'ils sont sous le coup d’une mauvaise presse. Nous avons besoin que le principal détaillant canadien prenne des mesures et fasse preuve de leadership.    

Mettre fin à la prime salariale n'était pas la bonne chose à faire. Unifor n'accepte pas l'accord conclu entre Loblaw et les TUAC. Nous pensons que la prime doit rester, de façon permanente.

Le maintien de cette prime témoigne d'un engagement envers les employés, alors que la pandémie continue de se propager. Cette prime corrige la baisse des salaires à laquelle les travailleuses et travailleurs ont été confrontés pendant des décennies. Cela contribue également à reconnaître « l'effort extraordinaire » que les employés de Loblaw déploient chaque jour pour rendre cette entreprise rentable, et ses dirigeants très riches.

Sincèrement,

Jerry Dias
Président national