Programme des travailleurs étrangers temporaires – Lancement du projet pilote pour les employeurs reconnus

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Travailleurs migrants dans un champ de culture
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Honorable Randy Boissonnault, c.p., député
Ministre de l’Emploi, du Développement de la main-d’œuvre et des Langues officielles

Monsieur le Ministre Boissonnault,

Au nom d’Unifor, le plus grand syndicat du secteur privé au Canada, j’aimerais vous faire part de notre profonde inquiétude concernant la décision de votre ministère de relancer le projet pilote pour les employeurs reconnus (PPER) dans le cadre du Programme des travailleurs étrangers temporaires (PTET). En élargissant l’accès des employeurs au PTET du Canada, en particulier dans les secteurs à bas salaires, les travailleuses et travailleurs migrants précaires seront plus vulnérables aux abus et à l’exploitation de la part des employeurs et des recruteurs, mais les conditions de travail de tous les travailleurs et travailleuses de l’ensemble du pays se dégraderont.

En tant que syndicat, nous sommes conscients des affirmations persistantes des employeurs concernant les soi-disant « pénuries de main-d’œuvre ». Si nous reconnaissons que certaines industries ont des difficultés légitimes à trouver des travailleuses et travailleurs qualifiés, nous constatons aussi que de nombreux employeurs ne déploient que peu d’efforts pour améliorer les salaires et les conditions de travail afin d’attirer la main-d’œuvre locale. L’étude de recherche menée par le Centre canadien de politiques alternatives confirme la véracité de cette observation : malgré le tollé général des employeurs concernant un besoin criant de main-d’œuvre, les offres d’emploi continuent d’annoncer des salaires qui sont bien en deçà des attentes des travailleuses et travailleurs.

Par conséquent, les employeurs qui offrent des salaires peu élevés se tournent de plus en plus vers le PTET et un nombre croissant de bassins canadiens de travailleuses et travailleurs migrants temporaires, comme le Programme des travailleurs agricoles saisonniers, le Programme de mobilité internationale et le programme des étudiants internationaux. La nature « temporaire » de ce programme doit être remise en question alors que ces mêmes employeurs ont recours au programme année après année pour embaucher de la main-d’œuvre. Si ces employeurs doivent effectivement régulièrement (et donc sur une base permanente) embaucher des travailleuses et travailleurs migrants, ces derniers devraient se voir offrir le statut de résident permanent afin de leur permettre de rester au Canada, d’y faire venir leur famille et d’y construire leur vie.

En outre, si le gouvernement fédéral veut vraiment s’assurer que les emplois vacants sont dotés, il doit offrir une plus grande sécurité d’emploi aux quelque 1,7 million de migrants temporaires et sans papier qui vivent et travaillent déjà au Canada et qui sont tombés entre les mailles du filet des nombreux programmes pour migrants temporaires, plutôt que d’instaurer des programmes pilotes qui ne font que pérenniser l’emploi précaire en facilitant l’accès à une main-d’œuvre jetable.

Aussi, bien que le gouvernement affirme que les travailleurs migrants temporaires disposent des mêmes droits que les travailleurs canadiens ou les résidents permanents, nous savons que ce n’est pas le cas. Les travailleuses et travailleurs migrants au Canada continuent d’affirmer que leurs droits fondamentaux et les normes d’emploi minimales ne sont pas respectés, qu’il s’agisse de salaires impayés, de retenues illégales, d’heures supplémentaires ou encore d’infractions en matière de santé et de sécurité. Le site Web du gouvernement fédéral nomme des centaines d’employeurs qui n'ont pas respecté les règles qui régissent le PTET et qui ont reçu des sanctions pécuniaires ou ont été exclus du programme.

Unifor souhaite réitérer les demandes dont les défenseurs des droits des travailleurs, des communautés et des migrants se font l’écho dans tout le pays. Le gouvernement fédéral doit donner suite à l’engagement qu’il a pris dans la lettre de mandat du premier ministre au ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté en 2021 et mettre immédiatement en œuvre un programme de régularisation ouvert et inclusif afin que les travailleuses et travailleurs migrants qui se trouvent déjà au Canada sans statut d’immigrant se voient accorder le statut de résident permanent à part entière. Le gouvernement doit également veiller à ce que tous les travailleurs migrants arrivant au Canada obtiennent le statut de résident permanent dès leur arrivée. C’est la seule façon de garantir que ces travailleuses et travailleurs peuvent faire valoir leurs droits dans leur milieu de travail sans craindre de perdre leur emploi ou de subir des représailles.

Le Canada ne peut pas continuer de bâtir une économie fondée sur l’insécurité, l’exploitation et la précarité de l’emploi. La situation mine l’intégrité de l’économie et du marché du travail du Canada, mais aussi des communautés où vivent ces travailleuses et travailleurs. Nous devons nous assurer que les programmes fédéraux en matière d’emploi et d’immigration fonctionnent conjointement au profit de la main-d’œuvre, et non pas uniquement des employeurs qui souhaitent une « flexibilité » constante au détriment du bien-être et de la sécurité des travailleuses et travailleurs.

Nous souhaitons vous remercier pour le temps que vous nous avez accordé et l’attention que vous porterez à cet important enjeu. Nous serions heureux d’organiser une rencontre avec votre équipe et vous pour en discuter davantage.

Cordialement,

Lana Payne
Présidente nationale d’Unifor

c.c. : Honorable Marc Miller, c.p., député, ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté