Lettre d’Unifor au premier ministre Carney Objet : Appuyer le secteur forestier canadien et les communautés qui vivent de cette industrie

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Monsieur le Premier Ministre Mark Carney,

Objet : Appuyer le secteur forestier canadien et les communautés qui vivent de cette industrie

Je vous écris pour solliciter une intervention urgente de la part de votre gouvernement afin de soutenir le secteur forestier, les travailleuses et travailleurs forestiers ainsi que les centaines de communautés rurales qui dépendent de cette industrie partout au Canada.

Unifor est le plus grand syndicat du secteur privé au Canada regroupant 320 000 membres partout au pays et présents dans tous les principaux secteurs de l’économie canadienne. Unifor est également le syndicat des travailleuses et travailleurs du secteur forestier avec plus de 24 000 membres œuvrant dans cette industrie qui sont répartis dans 10 provinces canadiennes. Les membres d'Unifor occupent une grande variété de postes liés à la foresterie et à l'exploitation forestière ainsi qu'aux produits du bois et à la bioénergie, en plus des emplois dans les usines de production de pâtes et papiers.

La polycrise qui frappe le secteur forestier canadien

Nos membres vivent concrètement les répercussions de la tempête parfaite qui frappe le secteur canadien de la foresterie qui continue de subir des crises interreliées de façon répétitive ainsi qu'une combinaison de facteurs défavorables associés à des difficultés économiques, environnementales et mondiales qui continuent de déstabiliser le secteur dans son ensemble.

Le conflit du bois d'œuvre résineux qui se poursuit et la menace de nouveaux tarifs douaniers ont mené à une intensification de cette guerre commerciale ayant des répercussions désastreuses pour le secteur de la foresterie. Plus tôt cette année, le Département du Commerce des États-Unis a augmenté à 34,45 % ses droits compensateurs préliminaires combinés sur le bois d'œuvre résineux canadien. En mars 2025, la Maison-Blanche a annoncé la tenue d'une soi-disant enquête en vertu de l'article 232 afin de déterminer les effets des importations de billots, de bois d'œuvre et de leurs produits dérivés sur la sécurité nationale du pays. Selon le résultat de cette enquête, il est possible que des tarifs douaniers supplémentaires soient imposés sur ces produits dès le mois de novembre. Ces tarifs douaniers potentiels s'ajouteraient aux tarifs douaniers inacceptables de 34,45 % déjà imposés sur le bois d'œuvre résineux et déclencheraient immédiatement une crise financière dans le secteur.

Chaque saison, les incendies de forêt constituent une grave menace à nos forêts, aux activités de l’industrie forestière et à nos communautés qui en dépendent. Les importantes mesures de préservation, y compris les efforts de protection des espèces et de l'habitat, continuent de compliquer la planification à long terme au sein de l'industrie. La volatilité des prix fait en sorte que les entreprises y réfléchissent à deux fois avant de réaliser des investissements et la nouvelle réglementation américaine pourrait influencer négativement les perspectives de vente des produits canadiens dans ce marché et ailleurs dans le monde.

Dans ce contexte marqué par diverses crises et compte tenu des difficultés communes à l'échelle nationale ainsi que de celles propres à chaque région, Unifor a lancé un appel en faveur d'une réponse stratégique plus coordonnée, élaborée par les représentantes et représentants de tous les ordres de gouvernement, les travailleuses et travailleurs du secteur forestier et leur syndicat, les communautés autochtones, les employeurs de l'industrie, les institutions de formation et d'éducation en foresterie ainsi que les communautés locales, tous ces intervenants agissants en tant que participantes et participants dans le cadre de ce processus.

Une stratégie de construction résidentielle nationale élargie

Unifor a déjà proposé la création d'une stratégie nationale de construction résidentielle qui permettrait de mieux relier les forêts et les produits du bois canadiens avec le secteur de la construction résidentielle dans le but de fournir des solutions à la crise du logement tout en appuyant le développement d'une industrie forestière durable axée sur la valeur ajoutée. 

Notre proposition mise sur le Plan du Canada sur le logement, mais vise à intégrer celui-ci encore davantage à la chaîne d'approvisionnement afin d'inclure l'exploitation forestière, le sciage et la fabrication des produits de bois et des produits de bois d'ingénierie fabriqués et récoltés au Canada. L'objectif consiste à générer davantage d'activité économique à valeur ajoutée ici même au Canada de façon à fournir de bons emplois aux travailleuses et travailleurs du secteur forestier, tout en développant un marché interne pour des produits de bois d'ingénierie novateurs pouvant servir à la construction de résidences modulaires, ce qui permettrait d'accroître l'offre résidentielle et ainsi favoriserait l'abordabilité.

Une stratégie forestière nationale élargie

Une stratégie forestière nationale élargie interpellerait l'ensemble des principaux intervenants mentionnés précédemment afin de guider la création et la mise en œuvre d'une puissante stratégie sectorielle permettant de bâtir un avenir durable pour les industries forestières canadiennes, les emplois bien rémunérés qu'elles fournissent et les communautés forestières au sein desquelles elles exercent leurs activités commerciales.

À l'échelle de l'ensemble du pays, tous les ordres de gouvernement doivent collaborer afin de fournir des mesures de soutien au revenu aux travailleuses et travailleurs du secteur forestier qui ont été affectés par les fermetures et les réductions de personnel causées par le conflit du bois d'œuvre résineux ou tout autre choc macroéconomique. Dans certains cas, pour « permettre aux producteurs de maintenir la production et garder les travailleuses et travailleurs au travail », les gouvernements fédéral et provinciaux doivent être disposés à fournir des mesures de soutien sous forme de liquidités aux employeurs du secteur forestier qui doivent composer avec les contraintes financières associées à la polycrise qui frappe actuellement l'industrie.

Une stratégie forestière nationale élargie serait également utile afin de coordonner une approche pancanadienne pour promouvoir et prioriser les projets de bioénergie forestière, les mesures de soutien pour les infrastructures forestières essentielles comme les routes forestières, et le développement de nouveaux marchés internes et étrangers pour les produits forestiers canadiens.

Flexibilité régionale et provinciale

Environ 12 000 membres d'Unifor œuvrant dans le secteur forestier vivent et travaillent au Québec, tandis qu'environ 4 000 membres sont en Ontario et dans les provinces de l'Atlantique, et 3 000 membres du secteur forestier vivent et travaillent Colombie-Britannique. Nos membres de la base ainsi que nos dirigeantes et dirigeants élus partout au pays sont bien conscients du contexte et des difficultés propres à chaque région et, grâce au travail du Conseil de la foresterie d'Unifor, nous avons aussi l'occasion de travailler ensemble à l'élaboration de stratégies et de recommandations nationales pour le secteur.

Comme nous l'avons mentionné précédemment, une stratégie forestière nationale complète doit comprendre une certaine flexibilité régionale puisque les enjeux comme la protection des espèces et l'habitat, le risque et les effets des incendies, l'approvisionnement en fibre, l'accès aux marchés étrangers, les coûts énergétiques et le marché de la main-d'œuvre diffèrent grandement d'une province et d'une région à l'autre.

Un plan complet et coordonné pour l'avenir

Alors que le secteur canadien de la foresterie et ses travailleuses et travailleurs doivent composer avec les répercussions de la polycrise en cours, il est essentiel que les gouvernements et les autres intervenants travaillent en étroite collaboration dans un esprit de coordination. Des politiques et les régimes à l'échelle régionale et provinciale sont nécessaires, mais ne suffiront pas à fournir des solutions aux difficultés auxquelles le secteur doit faire face. En résumé, une approche fragmentée ne fonctionnera pas. Les trois ordres de gouvernement doivent collaborer avec les autres intervenants pour développer un plan complet et coordonné à l'échelle nationale qui tient compte des enjeux propres à chaque région et fournit des solutions adéquates.

J'espère avoir l'occasion de vous rencontrer bientôt afin de discuter plus en détail de ces propositions. Le secteur forestier canadien et en particulier ses travailleuses et travailleurs ainsi que les communautés qui vivent de cette industrie ne peuvent plus se permettre d'attendre.

Cordialement,
              
Lana Payne               
Présidente nationale        

Daniel Cloutier
Directeur québécois