Lettre au ministre Anand et Champagne re : Processus d’investissement et de passation de marchés pour l’aéronef multimission canadien

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Groupe en t-shirts arc-en-ciel regroupés sous une arche arc-en-ciel
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Destinataires : Ministre Anand et Ministre Champagne

Objet : Processus d’investissement et de passation de marchés pour l’aéronef multimission canadien

Unifor est le plus grand syndicat du secteur privé au Canada regroupant 315 000 membres partout au pays, dont 11 000 personnes travaillant dans le secteur de l’aérospatiale. Les membres d’Unifor dans ce secteur assurent la conception, la construction et la finition d’aéronefs commerciaux, utilitaires et d’affaires; construisent des pièces pour les aéronefs de défense; effectuent des travaux de révision et de maintenance sur des aéronefs civils, militaires et gouvernementaux; conçoivent et fabriquent des simulateurs et des dispositifs de formation pour une gamme d’aéronefs commerciaux et militaires et sont engagés dans la production de satellites et de robotique pour l’exploration spatiale.

La dernière politique de défense du Canada a clairement stipulé que le gouvernement fédéral prévoit de remplacer sa flotte vieillissante d’aéronefs de surveillance et de lutte anti-sous-marine CP-140 Aurora. Ce projet d’investissement, baptisé aéronef multimission canadien (AMC), entraînera une refonte des capacités stratégiques de renseignement, de surveillance et de reconnaissance (ISR) du Canada au cours des prochaines décennies. Il constitue une occasion importante de tirer parti des compétences et du dévouement des travailleuses et travailleurs canadiens de l’aérospatiale qu’Unifor représente avec fierté.                

En décembre dernier, un rapport publié par le Ottawa Citizen, citant des sources de l’industrie et de la défense, indiquait que le gouvernement fédéral envisageait l’option d’accélérer le calendrier d’acquisition de l’AMC par le biais d’un contrat de vente militaire à fournisseur unique avec Boeing. L’article indiquait que Boeing avait « averti le gouvernement canadien que sa chaîne de production de P-8 Poseidon aux États-Unis pourrait être fermée d’ici à 2025, si des commandes supplémentaires ne sont pas passées », ce qui pourrait laisser entendre que pour garantir son accès au P-8, le gouvernement canadien devrait accélérer son processus de passation de marchés. À notre connaissance, aucune représentante ni aucun représentant du gouvernement n’a nié cette possibilité.

Passer à un contrat à fournisseur unique sans tenir compte de la vaste expérience, des capacités et du talent des travailleuses et travailleurs canadiens ou de la technologie avancée qu’ils construisent serait une grave erreur. Non seulement cette approche saperait le travail effectué par le service public dans le cadre du programme des retombées technologiques industrielles et technologiques afin de cibler les capacités et technologies basées au Canada dans le secteur, mais elle minerait également l’intention exprimée par le ministre Champagne de faire pour l’industrie aérospatiale ce qui a été fait pour l’industrie automobile.

L’industrie aérospatiale canadienne n’a pas besoin d’un contrat accordé avant même qu’une proposition de valeur complète ne soit préparée par des fournisseurs qualifiés, elle a besoin d’un gouvernement qui s’engage à ce que l’industrie aérospatiale soit robuste et florissante et qu’elle s’investisse dans la recherche et le développement, l’innovation, la création d’emplois et la formation professionnelle.  

Le programme des retombées industrielles et technologiques (RIT) du gouvernement fédéral est un pilier important de l’approche du Canada visant à cultiver l’industrie aérospatiale canadienne. La poursuite du programme et l’assurance d’avoir les meilleurs aéronefs avec le plus de contenu canadien possible sont des objectifs importants. Cependant, le programme des RIT n’est pas suffisant en tant que politique industrielle autonome. Il doit être complété par des actions gouvernementales décisives et une volonté d’engager la base industrielle de notre pays d’une manière plus proactive, de façon à tirer parti des avancées technologiques nationales clés, en particulier dans le secteur de la défense.

Le Canada a besoin d’une politique industrielle aérospatiale qui soit axée sur les actions suivantes :

  • Assurer la collaboration entre l’industrie, les travailleuses et travailleurs, les clients et le gouvernement
  • Cultiver la technologie et l’innovation de notre pays
  • Développer des grappes géographiques ou des écosystèmes susceptibles de stimuler davantage la collaboration, l’investissement et la création d’emplois
  • Faire en sorte que les bénéfices de l’activité industrielle profitent aux travailleuses et travailleurs et aux communautés, et pas seulement aux actionnaires et aux propriétaires d’actifs, moyennant la création et l’amélioration des emplois
  • Améliorer les activités de développement de la main-d’œuvre afin de garantir que les travailleuses et travailleurs disposent de la formation et des compétences nécessaires pour soutenir les objectifs industriels à long terme et libérer le potentiel de l’industrie
  • Trouver un équilibre adéquat entre les approches au niveau de l’offre axées sur le marché et les interventions ciblées au niveau de la demande dans les projets de marchés publics

La passation de marchés publics pour l’aéronef multimission canadien est l’occasion pour le gouvernement d’envoyer un signal clair et de passer de l’intention à l’action, en expliquant comment cette acquisition contribuera à faire croître l’industrie aérospatiale, les compétences, connaissances et offres de produits du Canada pour montrer au monde ce dont nous sommes capables.

L’industrie aérospatiale canadienne figurait autrefois parmi les 5 premières mondiales, mais nous avons perdu du terrain ces derniers temps en raison d’un manque de planification et de collaboration. Nous sommes impatients de travailler avec vous pour élaborer les politiques et cibler les investissements qui doivent être réalisés afin de voir l’industrie aérospatiale canadienne monter en flèche et profiter aux travailleuses et travailleurs qui en dépendent pour leur subsistance.

Cordialement,

Lana Payne                                            Daniel Cloutier
Présidente nationale d’Unifor                 Directeur québécois d’Unifor