Lettre à Monsieur le Premier Ministre Justin Trudeau et Madame la Ministre Lebouthillier Objet : Morue du Nord

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Le très honorable Justin Trudeau, C.P., député
Premier ministre du Canada

 

L’honorable Diane Lebouthillier, C.P., députée
Ministre des Pêches, des Océans et de la Garde côtière canadienne 

 

Bonjour Monsieur le Premier Ministre Justin Trudeau et Madame la Ministre Diane Lebouthillier,

Nous vous écrivons aujourd’hui au sujet d’un enjeu important auquel vous devriez accorder une attention particulière.

Au nom de 320 000 travailleuses et travailleurs partout au pays, y compris des 14 000 membres du Syndicat des pêcheurs, de l’alimentation et des travailleurs assimilés (SPATA) à Terre-Neuve-et-Labrador, nous vous demandons de revenir sur votre récente décision sur le moratoire sur la morue du Nord.

La décision de mettre fin au moratoire et d’accorder l’accès aux entreprises de la flottille hauturière va à l’encontre des engagements formulés par votre gouvernement et des pratiques de gestion des pêches adoptées depuis plusieurs dizaines d’années. 

Nous sommes également préoccupés par les répercussions potentielles de cette décision sur le secteur des pêches qui cherche encore à se remettre sur pied.

Votre gouvernement doit maintenir son engagement de 2015 consistant à attribuer la première part du quota de 115 000 tonnes de morue du Nord au secteur de la pêche côtière ainsi qu’aux groupes autochtones et rétablir immédiatement la pêche d’intendance selon les mêmes conditions qu’en 2023.

Cette façon de faire représentait un engagement bien connu réitéré dans l’approche de gestion de la pêche d’intendance de la morue du Nord de 2021 qui indiquait ce qui suit : « L’approche de gestion de 2021 comprend aussi une décision visant à attribuer la première part de 115 000 t de morues du Nord au secteur de la pêche côtière et aux groupes autochtones. Lorsqu’un total autorisé des captures (TAC) sera établi pour la morue du Nord (divisions 2J et 3KL), la première part de 115 000 t de l’accès des pêches canadiennes dirigées sera attribuée au secteur de la pêche côtière et aux groupes autochtones de Terre-Neuve-et-Labrador. Pour un TAC inférieur ou égal à 115 000 t, les activités de pêche dirigées seront limitées aux pêcheurs côtiers et aux groupes autochtones de Terre-Neuve-et-Labrador. Toutes les autres flottilles, auxquelles aucune part du quota n’aura été attribuée, seront limitées aux prises accessoires seulement. »

Comme nous l’avons mentionné, l’annonce du 26 juin sur la fin du moratoire et l’autorisation de l’accès aux entreprises canadiennes et étrangères de la flottille hauturière fait fi d’un engagement de longue date voulant que la première part de 115 000 tonnes du quota de morue du Nord soit attribuée au secteur de la pêche côtière ainsi qu’à leurs communautés côtières. Cet engagement est antérieur au moratoire sur la morue du Nord et a été instauré en 1982 par Roméo Leblanc dans le but de garantir que seuls les pêcheurs propriétaires-exploitants côtiers et les groupes autochtones profiteront des stocks de morue du Nord jusqu’à l’atteinte du seuil de 115 000 tonnes.

Monsieur le Premier ministre, il s’agit d’un engagement que vous avez maintenu dans une lettre adressée au SPATA en 2015 dans laquelle vous avez écrit ce qui suit : « Un gouvernement dirigé par Justin Trudeau réaffirmera l’engagement fédéral consistant à attribuer la première part du quota de 115 000 tonnes de morue du Nord aux pêcheurs côtiers de façon à ce que, lorsque les niveaux de la ressource remonteront, les bénéfices de la pêche future de morue reviennent aux pêcheurs côtiers et aux communautés côtières. » Depuis, le ministère des Pêches et Océans Canada a maintes fois soutenu le principe visant à accorder la priorité au secteur de la pêche côtière pour la première part du quota de 115 000 tonnes des stocks de morue dans les divisions 2J3KL.

D’une part, la décision de mettre fin au moratoire enfreint les engagements clairs pris auprès des pêcheurs locaux et de leurs communautés et d’autre part, elle n’a aucun fondement scientifique. Les populations de morue demeurent fermement dans la zone de prudence selon la plus récente évaluation du ministère des Pêches et Océans Canada et celles-ci ne peuvent soutenir la pression associée à une pêche accrue par les flottilles hauturières. Poursuivre la régénération de cette ressource socio-économique essentielle pour la province exigera une intendance et des politiques continues ancrées dans un engagement ferme visant à assurer une gestion durable des océans.

Compte du fait qu’une part importante de l’augmentation du total autorisé des captures à 19 000 tonnes pour cette année est accessible à la pêche hauturière, le secteur de la pêche à la morue sera encore une fois menacé par les mêmes grands chalutiers commerciaux et les pratiques de pêche irresponsables qui ont presque anéanti les stocks de morue du Nord il y a plus de 30 ans. Les stocks de morue risquent de revenir aux niveaux critiques des quelques dernières années, ce qui porterait un coup dur aux perspectives de reconstruction des communautés côtières qui ont déjà beaucoup souffert à la suite de plusieurs dizaines d’années de mauvaise gestion politique et économique.

Nous vous exhortons à corriger le tir et à revenir immédiatement sur cette décision. Les travailleuses et travailleurs de Terre-Neuve-et-Labrador ne doivent pas faire les frais de pratiques insouciantes en matière d’élaboration de politiques qui saper les durs sacrifices qu’ils ont consentis depuis l’instauration du moratoire. 

Nous exhortons le gouvernement à rétablir l’approche de la pêche d’intendance pour la morue du Nord selon les mêmes conditions qu’en 2023 et à réaffirmer son engagement envers l’attribution de la première part de 115 000 tonnes du quota au secteur des pêches côtières et aux groupes autochtones. 

C’est seulement lorsque ce seuil sera atteint que des consultations avec les intervenants devraient avoir lieu sur l’attribution pour la pêche hauturière canadienne et internationale. Toute autre façon de faire risquerait de menacer les intérêts économiques futurs des communautés côtières et des pêcheurs côtiers.

Nous demandons une rencontre avec le bureau du premier ministre afin de pouvoir discuter de cette question très importante pour les membres d’Unifor qui oeuvrent au sein de l’industrie des pêches. 

Cordialement,
                         
Lana Payne                                        Jennifer Murray
Présidente nationale                       Directrice de la région de l’Atlantique