La Conférence des travailleuses et travailleurs noirs, autochtones et de couleur 2025 d’Unifor honore ses racines de résistance et fait place à la guérison, à la justice et à la solidarité

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Four people wearing orange shirts
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Ce fut une fin de semaine de partage, de guérison, de célébration et de résistance.

Plus de 200 déléguées et délégués se sont rassemblés pour la Conférence annuelle des travailleuses et travailleurs noirs, autochtones et de couleur, qui s’est déroulée du 26 au 28 septembre 2025 à Port Elgin, en Ontario, sous le thème « Les racines de la résistance : guérison, justice et solidarité ». 
« La solidarité est incomplète si elle ne reflète pas les réalités et le vécu des travailleuses et travailleurs racialisés, lesquels ont trop souvent porté le double fardeau des inégalités économiques et de la discrimination, a déclaré la directrice de l’équité et de la justice raciale d’Unifor, Tricia Wilson. Les Autochtones, les Noirs et les personnes de couleur ont toujours été essentiels au mouvement syndical. Nos histoires racontent notre résilience, notre courage et notre résistance face à l’exclusion. »

Dans son allocution, la présidente nationale d’Unifor Lana Payne a expliqué qu’elle aimait particulièrement le thème de cette année, « Les racines de la résistance ». 

« Si l’année qui vient de s’écouler nous a enseigné quelque chose, c’est que la résistance est l’un des outils les plus puissants dont disposent les travailleuses et travailleurs pour lutter contre l’injustice », a-t-elle déclaré.

Mme Payne a donné des exemples du travail d’Unifor en matière d’équité, notamment une aide financière pour l’hébergement en lien avec le mouvement des femmes, filles et personnes bispirituelles autochtones disparues et assassinées; les événements dans le cadre de la Journée nationale de la vérité et de la réconciliation; le Mois de l’histoire des Noirs; le Mois du patrimoine asiatique; les actions sociales réalisées par le biais du Fonds de justice sociale. Elle a ajouté que ce travail était « un exemple éclatant de progrès, de solidarité, d’espoir, de courage et de la volonté de ne jamais abandonner. »

Mme Payne a insisté sur la nécessité de protéger les emplois au Canada et de continuer de résister aux injustices, comme les politiques fondées sur le racisme, la xénophobie, la cupidité des entreprises et l’exploitation de la main-d’œuvre migrante. 

« Chaque fois que vous vous opposez à ceux qui perpétuent le mal et qui essaient de nous diviser, chaque fois que vous négociez un nouveau poste d’intervenante auprès des femmes et chaque fois que vous prenez part à des événements organisés près de chez vous et pour votre syndicat, nous devenons plus forts ensemble », a-t-elle déclaré.

La conférence a débuté vendredi soir par une cérémonie d’accueil autochtone célébrée par l’Aînée Shirley John, suivie d’un cercle de tambours exécuté par le groupe des Niin Epiitendaagzid.

La directrice de la région de l’Ontario d’Unifor, Samia Hashi, a salué le militantisme des membres noirs, autochtones et de couleur d’Unifor. 

« Chaque jour, je vois des militantes et des militants racialisés qui se mobilisent, qui font avancer les discussions et qui veillent à ce que nos milieux de travail et notre syndicat soient plus équitables, plus sûrs et plus inclusifs », a-t-elle déclaré aux déléguées et délégués. 

Samia a fait le point sur les victoires remportées depuis un an et les luttes qui se poursuivent à la table de négociation et sur les lignes de piquetage. Elle a encouragé les membres à rester unis et à se faire entendre. 

« L’unité est notre arme la plus puissante, a dit Samia. Lorsque des entreprises et des politiciens essaient de nous dresser les uns contre les autres sur des questions relatives à la race, au genre ou aux régions, notre rôle est de nous serrer les coudes et de répondre : pas aujourd’hui, et jamais. Beaucoup de travailleuses et de travailleurs méritent d’avoir des chances égales pour obtenir un bon emploi, un milieu de travail sécuritaire et un avenir exempt de discrimination et de haine. »

La conférencière invitée Kayla Webber a abordé le « concept d’enracinement et de transformation », c’est-à-dire rester en contact avec la communauté tout en honorant les ancêtres, par le canal de la solidarité.

Kayla, dont les ancêtres viennent de Trinidad et de la Jamaïque, a parlé avec tendresse des étés qu’elle passait avec ses grands-parents dans le quartier de la Petite Jamaïque, à Toronto. Elle a dit que les membres noirs, autochtones et de couleur doivent réaliser que la vie est plus que la simple survie et se tourner vers la prospérité, la justice et la transformation. Elle a présenté la guérison non pas comme une métaphore, mais comme une demande incarnée.

« Honorer [les ancêtres] ne consiste pas seulement à jeter un regard vers le passé, a-t-elle dit, mais à ancrer notre travail dans la tradition, le sens du devoir et la responsabilité sacrée de poursuivre ce qu’ils ont commencé. » 

Kayla a demandé aux syndicats et aux institutions d’aller au-delà de la neutralité « pour s’engager dans la transformation » en redistribuant les ressources, en affrontant la suprématie blanche et en privilégiant la guérison et la dignité. 

Gina Smoke, agente de liaison d’Unifor pour les questions autochtones, a souligné l’importance pour toutes les personnes présentes, et particulièrement les hommes, de continuer à choisir le travail de guérison et de demander de l’aide lorsqu’elles ont besoin de soutien en santé mentale.

« Les dépendances sont principalement dues à des problèmes de santé mentale. Nous vivons beaucoup de traumatismes pendant l’enfance, a déclaré Gina. Heureusement pour moi, je suis ici avec vous aujourd’hui, malgré tous les traumatismes que j’ai subis, et j’aspire à faire mieux et à m’épanouir, mais je sais également que les choses ne se passent pas toujours comme ça. » 

Pendant le deuxième jour de la conférence, les déléguées et délégués ont écouté avec attention une discussion réunissant trois panélistes autochtones, quelques jours avant la Journée nationale de la vérité et de la réconciliation, le 30 septembre.

L’ancien chef de la Première Nation de Long Plain, Dennis Meeches, a prononcé un discours puissant, dans lequel il a décrit des expériences vécues dans sa famille et avec ses grands-parents, qui lui ont appris le chemin du pow-wow, à chanter et à danser. Il a expliqué pourquoi le Musée national des pensionnats autochtones, déclaré site historique en 2020, est un élément important de la réconciliation au Canada.

« Ma mère s’est enfuie de l’école avec deux amies, mais elles se sont fait prendre et ramener à l’école, et les religieuses leur ont rasé la tête. À toutes les trois. Ma mère et ses amies ont mis des sacs sur leurs têtes pour cacher l’opprobre qu’on leur avait fait subir, a-t-il expliqué. [Ce musée] aide d’autres survivants sur le chemin de la guérison; il informe et sensibilise sur les conséquences des pensionnats et garde vivant le souvenir de ce pénible chapitre. »

La conférencière Katherine Strongwind est l’une des quelque 20 000 enfants autochtones qui ont été enlevés de leurs foyers à partir des années 1950 et jusqu’au milieu des années 1980. Elle a parlé du travail qu’elle fait pour comprendre et guérir le traumatisme intergénérationnel causé par la rafle des années 1960

Katherine a cofondé le groupe Sixties Scoop Legacy en 2017, et elle continue de militer pour obtenir reconnaissance, identité, réparation et guérison.

« Nous ne savons pas encore combien d’enfants autochtones ont été enlevés ni combien d’entre eux sont morts pendant qu’ils faisaient l’objet d’un placement ou combien ont été adoptés, a-t-elle déclaré. Il y en a d’autres comme moi qui continueront de parler haut et fort et de raconter ce qui est arrivé... afin que nous puissions avancer ensemble dans l’harmonie. »

Tera McDonald a exhorté les déléguées et délégués à exercer leur esprit critique pour comprendre ce que le mot « réconciliation » signifie vraiment. Elle a redéfini la réconciliation avec des mots simples : considération, générosité et gentillesse.

« L’expression « réconciliation économique » semble prétentieuse, mais à la base, il y a la séparation des peuples autochtones par le colonialisme, la bureaucratie et la politique. C’est la séparation des familles auprès desquelles ils auraient pu grandir et s’épanouir. Soyez généreux avec les autres, écoutez leurs témoignages... La gentillesse fera des merveilles. »

Debbie Owsusu-Akyeeah est directrice des politiques et de la mobilisation à Action Canada pour la santé et les droits sexuels. Dans son allocution sur la lutte contre l’extrême droite, elle a déclaré que la justice reproductive et les droits de la personne sont les premières pertes en cas d’érosion de la démocratie. Elle a utilisé le « Convoi de la liberté », qui a paralysé le centre-ville d’Ottawa en 2022, comme un exemple de polarisation et d’opposition contre les victoires progressistes. 

« La solidarité est l’antidote aux menaces, a-t-elle déclaré. Nous avons également besoin de mieux structurer notre discours sur nos enjeux. Je sais que ce n’est pas juste de devoir faire attention à la façon dont nous rédigeons nos messages, alors que l’autre camp peut dire n’importe quoi et s’en tirer impunément. La différence, cependant, est que nous affrontons des acteurs qui ont beaucoup d’argent, qui agissent en coordination et qui ont passé beaucoup de temps à attaquer nos mouvements progressistes, parce que nos mouvements sont extrêmement puissants. »

Après la présentation de Debbie, les déléguées et délégués ont participé en petits groupes à un atelier sur la montée de la droite. 

Michelle Wilson, qui est une opératrice de transports en commun et membre de la section locale 111 d’Unifor, a été réélue comme représentante des Autochtones au sein du Conseil exécutif national d’Unifor; Sharlene Henry a été élue comme représentante des membres noirs et de couleur.

« Je suis vraiment honorée d’être réélue à ce poste pour représenter les Autochtones, a déclaré Michelle, une fière membre crie/mohawk de la Première Nation de Michel, en Alberta, qui vit maintenant en Colombie-Britannique sur le territoire non cédé de la Première Nation Kwikwetlem. Ce n’est pas une victoire ordinaire, c’est une victoire pour nous tous. Pour nos nations, nos moyens d’expression et le travail que nous faisons ensemble. Nous avons fait des progrès, mais ce n’est qu’un début. »

Sharlene Henry, coprésidente du syndicat des locataires de York South-Weston, à Toronto, et membre de la section locale 1285 d’Unifor, a remercié les déléguées et délégués. « Je ferai de mon mieux pour représenter tous les travailleurs et travailleuses, mais plus particulièrement les travailleuses et travailleurs de couleur et nos consœurs et confrères autochtones, a-t-elle déclaré. Solidarité. »

Dans son allocution, Risha Dave, psychothérapeute spécialisée dans les traumatismes, a raconté son parcours personnel et fait part de son opinion professionnelle quant aux moyens à prendre pour redéfinir le soin de soi au-delà de l’idée véhiculée par l’industrie du bien-être à la mode occidentale – par exemple, les spas, les massages et les suppléments – qui cherchent à réaliser des profits en exploitant les traumatismes intergénérationnels. 

Le repos brise le cycle qui fait en sorte que la valeur des travailleuses et travailleurs noirs, autochtones et de couleur n’est considérée qu’en fonction de leur productivité, a-t-elle dit.

« Le soin de soi n’est pas quelque chose que l’on achète ou que l’on fait. C’est quelque chose qu’il faut reconquérir. En nous reposant, nous refusons de travailler dans un système conçu pour nous exploiter. En nous reposant, nous disons donc que notre vie ne servira pas à les enrichir. »

Le dernier jour de la conférence des travailleuses et travailleurs noirs, autochtones et de couleur a attiré l’attention sur l’importance des questions qui touchent la main-d’œuvre migrante. Les déléguées et délégués ont écouté quatre panélistes raconter leurs expériences personnelles et critiquer ceux qui demandent l’élimination du Programme des travailleurs étrangers temporaires. Les panélistes ont insisté sur le fait que la justice à l’égard des travailleuses et travailleurs migrants est essentielle pour la dignité humaine, la défense des droits et l’économie canadienne.

Dans son mot de la fin, Tricia Wilson, directrice en matière d’équité et de justice raciale d’Unifor, a dit que les différentes expériences et histoires des membres étaient des moyens de renforcer leur unité. « Trouvez le rythme dans votre vie pour votre équilibre. Comme travailleuses et travailleurs, notre rythme est le rythme de la solidarité, le rythme de marcher ensemble. Lorsque nous trouverons notre équilibre collectif, il sera impossible de nous arrêter. »

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