Il y a un vent de changement dans l’air, mais de quel côté tourne-t-il?

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Linda MacNeil
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Le nouveau budget du premier ministre Andrew Furey s’intitule Un vent de changement dans l’air, mais on ignore encore si son gouvernement se dirige vers la mise en œuvre d’autres recommandations dommageables du rapport de l’équipe de relance économique du premier ministre ou une relance économique juste et inclusive pour tous.

Le budget 2022 indique que le gouvernement est prêt à opérer des transformations importantes, mais qu’il n’est pas encore prêt à décider de la direction que prendra ce changement. J’ai plus de questions que de réponses quant à la voie qu’il choisira : optera-t-il pour le strict minimum dans les deux cas, c’est-à-dire s’en tenir au statu quo?

À vrai dire, les travailleuses et travailleurs se préparaient au pire, s’attendant à des coupes majeures dans les services et les emplois du secteur public, mais le fait que le budget ne soit pas aussi mauvais qu’on le craignait n’en fait pas pour autant un bon budget.

En fait, le premier ministre Furey et sa ministre des Finances ont essentiellement ignoré les besoins des travailleuses et travailleurs et le rôle que la création d’emplois de qualité peut jouer dans une relance économique qui profite au plus grand nombre plutôt qu’à seulement quelques-uns.

En 2020, plus de 1 400 membres d’Unifor des épiceries Dominion ont fait la grève. Plus de 80 % des travailleuses et travailleurs occupaient un emploi à temps partiel, et bon nombre gagnaient le salaire minimum ou à peine un peu plus. Cette grève de 3 mois a soulevé le problème des emplois précaires peu rémunérés dans une province où le salaire minimum arrive au quatrième rang des plus bas salaires minimums au pays. Dans ce budget, le gouvernement n’a pas reconnu que ce problème pouvait être corrigé par une simple augmentation du salaire minimum à 15 $ l’heure. Les travailleuses et travailleurs les plus vulnérables ont plutôt été ignorés.

Le taux de chômage dans la province est déjà le plus élevé au pays, un problème que le budget n’aborde pas non plus.

Il est temps qu’Andrew Furey se concentre sur la création d’emplois de meilleure qualité en mettant en œuvre des pratiques de planification d’horaires équitables afin d’engendrer plus d’emplois à temps plein, en s’assurant que la valeur créée par les pêches reste à Terre-Neuve-et-Labrador en renversant la concentration des entreprises, en tirant parti des compétences des travailleuses et travailleurs du secteur de l’énergie par des investissements dans les ressources énergétiques futures, ainsi qu’en maintenant des services publics solides et en y investissant.

Si personne ne s’en doutait avant, la pandémie nous a ouvert les yeux sur notre dépendance à l’égard de nos services publics.

Lorsque les travailleuses et travailleurs du secteur public ne sont pas soutenus, les services s’effondrent. Lorsque les services dont nous dépendons s’effondrent, nous nous effondrons tous.

C’est peut-être contre-intuitif pour bon nombre d’entre nous, mais investir dans les services publics en temps de crise attire les investissements du secteur privé et crée des emplois. L’amélioration des salaires et des conditions de travail fait croître l’économie à partir de la base, ce qui permet à davantage de personnes d’avoir les moyens de participer pleinement à la vie économique.

Une décision à contre-courant dans le budget a entraîné une augmentation des dépenses en santé tout en annonçant simultanément la fusion des autorités régionales de la santé. On ne sait donc pas si le gouvernement a l’intention de suivre la recommandation de l’équipe de relance économique de réduire de 35 % le budget en soins de santé ou d’investir davantage dans des initiatives visant à améliorer la qualité des emplois et à retenir les travailleuses et travailleurs de la santé afin d’accroître la qualité des emplois et des soins.

Le contraste est frappant par rapport aux mesures prises dans le budget de la Nouvelle‑Écosse la semaine dernière. Dans ce budget, nous avons vu le premier ministre Tim Houston prendre des mesures fermes pour améliorer les conditions de travail et les soins dans le secteur de la santé, reconnaissant les améliorations comme une stratégie de maintien des effectifs.

La vérité, c’est qu’Andrew Furey a mis des couteaux bien aiguisés sur la table depuis un an et demi, comme en témoigne le choix de Moya Greene, reconnue à l’échelle internationale pour son penchant pour les compressions et la privatisation, pour diriger l’équipe de relance économique du premier ministre.

À bien des égards, ce budget indique que le plan néfaste énoncé dans le rapport The Big Reset de l’équipe de relance est en suspens, mais aussi qu’il est encore sur la table.

Comme l’indique la série de blogues « Une remise à zéro équitable », une grande remise à zéro entraînerait la perte de 9 000 emplois, réduirait les salaires des travailleuses et travailleurs du secteur public, et augmenterait les inégalités en poussant davantage de personnes vers des emplois à bas salaire.

Et donc la question demeure : s’agit-il d’un moratoire temporaire sur la mise en œuvre du rapport de l’équipe de relance économique ou d’un changement de cap dont nous avons cruellement besoin? Tant que nous n’aurons pas la réponse, les Terre-Neuviens et les Labradoriens nageront dans l’incertitude.