Après des décennies d’exploitation et d’inaction, il faut remettre de l’ordre dans le secteur forestier de la Colombie-Britannique

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Gavin McGarrigle, Western Regional Director
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Par Gavin McGarrigle, directeur de la région de l’Ouest d’Unifor

Publié initialement dans le Quesnel Observer, le Campbell River Mirror et le Williams Lake Tribune le 6 décembre 2021.

Avant que la « rivière atmosphérique » ne s’abatte sur le sud de la Colombie-Britannique, provoquant des inondations historiques, emportant des autoroutes et isolant des communautés entières, une autre catastrophe environnementale et économique faisait déjà rage.

Après des décennies de faux départs, de demi-mesures et de débats politiques sur la coupe d’arbres, la politique forestière de la Colombie-Britannique est à la croisée des chemins. La politique forestière est complexe et mobilise un certain nombre d’intervenants et de groupes d’intérêts particuliers, notamment des gouvernements locaux et provinciaux, des dirigeants autochtones, des entreprises forestières, des universitaires, des experts de l’industrie, des écologistes et, bien sûr, des travailleuses et travailleurs forestiers et leurs communautés.

Il ne fait aucun doute que le gouvernement provincial est prêt à prendre des mesures importantes et à élaborer une nouvelle approche globale de la gestion des forêts qui tentera de répondre aux préoccupations de tous ces acteurs afin de protéger et de préserver les forêts de la province pour les générations à venir. Pourtant, les travailleuses et travailleurs et les communautés qui dépendent de l’industrie forestière craignent vivement d’être laissés pour compte alors que le gouvernement provincial effectue la transition vers une nouvelle politique de gestion durable des forêts.

Plus tôt ce mois-ci, le gouvernement provincial a annoncé un arrêt temporaire de l’exploitation de ses forêts anciennes les plus menacées. Bien que nous soyons d’accord avec la nécessité de protéger les forêts anciennes et d’élaborer une politique forestière durable et responsable en partenariat avec les communautés autochtones, nous craignons que le sentiment d’urgence du gouvernement ne l’amène à priver les travailleuses et travailleurs forestiers et leurs communautés d’une protection suffisante et d’un soutien adéquat.

Nous avons eu quelques discussions initiales avec le gouvernement, mais nous ignorons encore en quoi consiste le plan pour soutenir les milliers de travailleuses et de travailleurs touchés par cette transformation de leur secteur. Nous ignorons ce que seront le type de financement transitoire, le soutien à la formation et les autres ressources mis à leur disposition. Certains de ces travailleurs et travailleuses approchent peut-être de la retraite, mais beaucoup d’autres ont de jeunes familles à élever. Il est urgent d’accorder d’importantes sommes pour soutenir les travailleuses et travailleurs et leurs communautés pendant la transition afin qu’ils n’aient pas à assumer les coûts individuels ou communautaires de ce qui constitue au bout du compte une transition sociétale.

Pour ceux et celles d’entre nous qui travaillons dans le secteur forestier, rien dans le report actuellement proposé ne devrait surprendre. Connue depuis des années, la situation a fait l’objet d’innombrables études d’experts, de rapports gouvernementaux et de séances de consultation interminables. Il faudrait probablement rouvrir plusieurs usines de pâtes et papiers seulement pour imprimer la montagne de rapports produits au fil des ans.

Les gouvernements précédents sont restés inactifs en regard de cette situation, mais le NPD de la Colombie-Britannique prend enfin des mesures, et la ministre des Forêts, Katrine Conroy, connaît les défis qu’elle doit relever pour apporter un réel changement.
Bien que des décennies d’inaction du gouvernement aient contribué à la crise qui sévit aujourd’hui, la situation actuelle dans le secteur forestier de la Colombie-Britannique découle d’une surexploitation systématique, d’une gestion favorisant les profits à court terme au détriment de la durabilité à long terme, et de promesses non tenues par les entreprises forestières elles-mêmes. 

En termes simples, le secteur forestier de la Colombie-Britannique est en difficulté et l’industrie forestière a contribué à son propre effondrement.

Néanmoins, le secteur forestier de la Colombie-Britannique est loin d’être en déclin, et nous sommes convaincus que le gouvernement provincial peut rectifier le tir et veiller à ce que les travailleuses et travailleurs et leurs communautés ne soient pas privés d’un soutien important. La récente nomination des médiateurs chevronnés que sont Vince Ready et Amanda Rogers, qui devront présenter un rapport au ministre du Travail d’ici février 2022 sur la façon de protéger les travailleuses et travailleurs lorsque les permis changent, est une mesure bienvenue, mais attendue depuis longtemps. Le nouveau projet de loi déposé pour donner au gouvernement plus de poids dans le secteur forestier est une bonne chose, mais les groupes d’intérêts particuliers ne seront pas satisfaits et pourraient tenter d’utiliser les travailleuses et travailleurs et leurs communautés comme des pions sur l’échiquier pour éviter le changement.

Nous devons élaborer ensemble une approche fondée sur une prémisse simple : à quoi devrait ressembler le secteur de l’exploitation forestière en Colombie-Britannique? Comment protéger nos forêts anciennes, assurer l’avenir à long terme du secteur forestier et lutter contre les changements climatiques, tout en offrant aux Britanno-Colombiens des emplois permettant d’assurer la viabilité des communautés, de bons emplois syndiqués à long terme et des avantages économiques?

Lorsqu’il est question de la gestion durable des forêts en Colombie-Britannique, personne ne devrait douter de l’urgente nécessité de bien faire les choses. Les enjeux sont extraordinairement élevés. Des milliers d’emplois et l’avenir de nombreuses petites villes sont en jeu.

Les périodes de crise exigent un leadership efficace et responsable, et nous demandons au premier ministre John Horgan, à la ministre Katrine Conroy et à leur gouvernement d’établir de nouveaux fondements durables et inclusifs pour le secteur forestier de la Colombie-Britannique pour les générations à venir.

Gavin McGarrigle est le directeur de la région de l’Ouest d’Unifor. Unifor représente 24 000 travailleuses et travailleurs forestiers au Canada, dont quelque 3 500 en Colombie-Britannique.