Analyse du mouvement des gilets jaunes en France

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Julien Tourreille, docteur en science politique, de la Chaire Raoul-Dandurand en études stratégiques et diplomatiques de l’Université du Québec à Montréal, a présenté une analyse du mouvement des gilets jaunes en France. Il s’est notamment interrogé sur les réels impacts de cette crise sur les partis politiques et les institutions sociales, dont les syndicats. Quelle en est la source ? S’agit-il d’un mouvement de fond ? Quel héritage laisse-t-il s’il y a lieu ? Voilà quelques-unes des pistes de réflexion explorées.

« Entre sentiment d’être laissé pour compte, impopularité des décideurs politiques et décisions gouvernementales contestées, vous avez là ce qui me semble être les principaux ingrédients de cette crise des gilets jaunes », a expliqué M. Tourreille.

Car malgré l’aspect spectaculaire des nombreuses manifestations, le chercheur estime qu’il s’agit d’un mouvement social d’une envergure relativement modeste. En effet, plusieurs facteurs expliquent cet état de fait, à commencer par la question de la violence qui en a rebuté plus d’un. C’est pourquoi le mouvement n’a pas pu capitaliser et rassembler davantage. Le dernier élément à considérer est l’incapacité du mouvement à faire émerger un chef.

Le contexte français et ce que M. Tourreille identifie comme la sinistrose et la défiance caractérisée du peuple français ont été d'autres éléments catalyseur de ce mouvement. 

Malgré tout, les gilets jaunes auront réussi à obtenir des concessions du gouvernement de l’ordre de 10 milliards d’Euros. Ce qui, parallèlement, contribue à renforcer la perception que les syndicats n’ont plus de pouvoir puisque de leur côté, ils n’ont pas remporté de victoire depuis longtemps.

Ainsi, si le mouvement des gilets jaunes n’a pas profité aux syndicats, il n’a pas n’ont plus reformater le paysage politique français. En effet, leur mouvement ne s’est pas traduit par un appui massif au contraire, comme le démontrent les résultats aux élections européennes. En effet, les sympathisants du mouvement se sont plutôt rangés derrière le parti Rassemblement national, un parti de droite.

Mais est-ce à dire que le mouvement des gilets n’a été qu’une réaction éphémère ? Non croit le chercheur. Et le phénomène des « gilets jaunes est un avertissement sérieux autant pour le pouvoir politique que pour les corps constitués dont les syndicats ».

Plus fondamentalement, M. Tourreille croit que « le mouvement des gilets jaunes peut être annonciateur d’un risque de dérive populiste de la démocratie française, sur le modèle de ce qui a pu se passer aux États-Unis avec le Tea Party ouvrant la voie à l’élection de Donald Trump ».