Le lock-out à Gander doit cesser

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Publié le 23 décember, 2017 dans The Telegram

Par Ignatious Oram
Membre d’Unifor, président d’unité à la section locale 597

Je suis l’un des 32 travailleurs et travailleuses placés en lock-out quelques jours avant Noël l’année dernière par mon employeur américain, D-J Composites, qui exploite une usine aérospatiale à Gander, Terre-Neuve.

L’année a été difficile pour nous tous et nos familles. Plusieurs de mes collègues ont épuisé leurs épargnes afin de joindre les deux bouts. Nos enfants et petits-enfants ont subi les impacts de ce conflit. Nous ressentons un immense poids sur nos épaules. Et pourtant, en tant que groupe, nous sommes devenus encore plus forts. Nous sommes devenus des amis, pas juste des collègues. Nous avons perdu des proches et avons vécu des deuils ensemble. Nous avons aussi partagé des moments de joie, comme la naissance d’un petit-enfant. Et nos consœurs et confrères syndicaux nous ont manifesté une incroyable chaleur et de la solidarité de partout au pays, même des États-Unis. Ils nous ont dit qu’on leur avait inspiré du courage. Pourtant, c’est eux qui nous ont donné une leçon d’humilité avec leurs messages, leur soutien financier et leur profonde solidarité.

Mais, quel choix avions-nous? La position de notre employeur dès le début a été d’attaquer notre droit le plus fondamental au Canada d’appartenir à un syndicat et de négocier équitablement et librement. Sa position dès le départ a été de diviser la main-d’œuvre par des demandes flagrantes de réductions salariales, de gel salarial et de destruction des protections d’ancienneté.

Il est clair que D-J Composites, de l’État du Kansas qui prône le droit au travail, ne veut tout simplement pas de syndicat dans l’usine, même si nous étions syndiqués bien avant que cet employeur en fasse l’acquisition en 2012.

En mars, l’employeur est finalement revenu à la table de négociation avec, croyez-le ou non, une offre pire encore qu’au moment où il nous a placés en lock-out dans le froid.  Plutôt qu’un gel salarial, la compagnie a demandé des compressions salariales et voulait éliminer toutes nos années d’ancienneté.

L’employeur savait bien que de telles demandes n’aboutiraient pas à la négociation d’une entente.

Nous avons déposé une plainte à la Commission des relations de travail de Terre-Neuve-et-Labrador qui a reconnu cet employeur coupable de négociation de mauvaise foi en mai. Une telle violation est rare. Et bien que la commission ait ordonné à l’employeur de retirer certaines de ses demandes et de faire une nouvelle offre, elle n’était guère différente, seulement présentée autrement.

Pour comprendre notre frustration, vous devez connaître l’histoire de cette compagnie de l’aérospatiale à Gander.

D-J Composites était avant CHC Composites.

CHC Composites a reçu 9,5 millions de dollars en subventions provinciales à la condition qu’elle crée des emplois en aérospatiale à Gander.

 

Cinq ans plus tard, la compagnie a encore demandé un autre investissement de 1 million de dollars et elle l’a reçu.

La compagnie était censée créer 1100 emplois, comptés en années-personnes. Je ne crois pas qu’elle ait respecté cet engagement.

L’usine a ensuite changé de main à deux reprises. Et la main-d’œuvre a continué de baisser.

Le fait que la compagnie ait changé de propriétaires ne change pas le fait que la province de Terre-Neuve-et-Labrador devrait demander un retour sur cet investissement. À tout le moins, le gouvernement devrait demander que les droits des travailleuses et travailleurs soient respectés en vertu de la loi du travail.

Comment une compagnie américaine peut-elle s’en tirer en violant nos droits? Elle a enfreint nos lois du travail sans aucune conséquence. C’est une situation que mes collègues et moi n’arrivons pas à comprendre. Pourquoi notre gouvernement provincial n’est-il pas autant scandalisé que nous? Et les personnes que nous avons élues ne devraient-elles pas intervenir?

Les élus pourraient d’abord commencer par corriger nos lois du travail afin de prévoir de réelles conséquences lorsque des compagnies se comportent de la sorte. Lorsqu’un employeur se comporte de façon aussi monstrueuse comme c’est le cas ici, l’affaire devrait être envoyée à l’arbitrage exécutoire. 

Alors que nous allons vivre un autre Noël dans le froid sur la ligne de piquetage en plein hiver, je demande à notre gouvernement d’intervenir et d’envoyer un message aux employeurs qui estiment pouvoir démanteler les syndicats et maintenir les gens à la rue en croyant nous affamer pour que l’on se plie à leurs demandes.

Cette année a été brutale pour nous, tant financièrement qu’émotivement. Mais notre esprit n’a pas été atteint.

Nous pouvons compter les uns sur les autres, nous avons nos familles et nos amis, et nos consœurs et confrères syndicaux de partout au pays sont avec nous.

Nous avons maintenant surtout besoin qu’un gouvernement nous soutienne.