Des congés de maladie payés sont nécessaires

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Cette chronique a été publiée dans le Globe and Mail

Les gens vont travailler lorsqu’ils sont malades. Ils l'ont toujours fait. La différence, c'est que maintenant, c'est mortel.

En Alberta, des éclosions majeures dans un abattoir ont vu des centaines de personnes contracter la COVID-19, et trop de décès. Les gens ont déclaré qu'ils allaient travailler alors même qu'ils présentaient des symptômes, sous la pression de leurs employeurs pour qu'ils travaillent.

Dans la région de Peel, à l'ouest de Toronto, où il y a eu 218 éclosions sur les lieux de travail, une étude a révélé que sur 7 874 personnes atteintes de la COVID-19, près de 2 000 sont allées travailler avec des symptômes, et 80 sont même allées travailler après avoir reçu un test positif de COVID-19.

Il est facile de secouer la tête. Il est facile de dire que vous resteriez à la maison et que vous feriez ce qu'il faut, mais demandez-vous ce que vous feriez si vous risquiez de perdre une journée de salaire parce que votre nez coule ou que le café du matin ne sent pas aussi fort.

Mieux encore, dites-moi à quel point il serait facile de renoncer à une semaine, deux ou trois semaines de salaire ou plus. Quels que soient vos revenus, cela vous ferait mal. Nous sommes trop nombreux à vivre d’un chèque de paie à l’autre.

Mais pour ceux qui n'ont pas de congés de maladie payés, c'est le genre de décision qu'ils sont obligés de prendre lorsqu'ils tombent malades, et la douleur qu'ils sont obligés d'envisager. Seuls 42 % de tous les travailleurs et travailleuses au Canada ont accès à des jours de maladie payés. Pour les moins bien payés, ce n'est que 10 %.

Nous pouvons fermer tous les restaurants que nous voulons, forcer tous les détaillants à passer à la collecte sur le trottoir et donner des amendes aux personnes qui embrassent leurs voisins, mais tant que nous ne prendrons pas au sérieux les congés de maladie payés, il n'y aura aucun moyen de sortir de cette pandémie.

Le fait est que les travailleuses et travailleurs sur lesquels nous avons appris à compter le plus pendant cette pandémie sont les plus vulnérables aux éclosions sur le lieu de travail – des salariés mal payés et souvent temporaires.

Il s'agit des travailleuses et travailleurs des épiceries qui n'ont pas la possibilité de travailler à domicile. Les travailleuses et travailleurs des entrepôts sont poussés à bout, car nous faisons tous des achats en ligne. Les livreurs, les fabricants de produits alimentaires, les travailleuses et travailleurs des soins de longue durée ont tous un faible taux de syndicalisation, de bas salaires et peu d'avantages sociaux. Il n'est donc pas si simple pour eux de faire le choix évident de rester à la maison lorsqu'ils sont malades.

Bien entendu, rester à la maison quand on est malade ne se limite pas à se sentir mieux avant de retourner travailler, il s'agit aussi de ne pas rendre malades ses collègues.

Il est tentant de penser que les vaccins vont nous permettre bientôt à tous de reprendre le travail en toute sécurité, mais c'est se leurrer. Nous ne serons pas proches d'une vaccination complète avant l'automne – encore des mois – et, dans l'intervalle, des milliers d'autres personnes tomberont malades sans bénéficier d'une sécurité adéquate sur leur lieu de travail. Je ne veux pas penser au nombre de personnes qui vont mourir.

Avec l'apparition des nouveaux variants super propagateurs dans tout le Canada, les enjeux sont encore plus importants et le besoin de congés de maladie payés encore plus fort.

Des congés de maladie payés sont un élément fondamental de la sécurité sur le lieu de travail. Unifor réclame trois semaines de congés de maladie payés jusqu'à la fin de la pandémie et une semaine après.

Cela serait évidemment bon pour les travailleuses et travailleurs, mais aussi pour les entreprises, c'est pourquoi de plus en plus de groupes d’affaires se rallient à l'idée.

Par exemple, la Chambre de commerce de l'Ontario a déclaré que les congés de maladie payés ne protégeaient pas seulement les travailleuses et travailleurs, mais aussi « l'ensemble de l'entreprise ».

Les responsables de la santé publique de tout le Canada réclament depuis longtemps des congés de maladie payés, tout comme le maire de Toronto, John Tory, qui est l'ancien chef du Parti progressiste-conservateur de l'Ontario.

Il ne s'agit plus d'une question de gauche contre droite, de syndicat contre entreprise. Il s'agit simplement d'une question de bonne politique.

En même temps, aucune entreprise ne veut commencer par offrir des congés de maladie payés alors que ses concurrents ne le font pas. Seuls des congés de maladie rémunérés, payés par l'employeur, peuvent maintenir des conditions de concurrence équitables, tout en garantissant que les travailleuses et travailleurs ne propagent pas ce virus, ou tout autre, pendant leur travail.

Nous sommes allés bien au-delà d'une simple admonestation polie des collègues qui arrivent avec un rhume ou une toux. Combien de fois avez-vous dit ou vous a-t-on dit : « Vous avez une voix affreuse, vous devriez rentrer chez vous », pour ensuite rire et continuer à travailler?

Dans un monde pandémique ou post-pandémique, ce n'est pas suffisant. Plus maintenant.